Précisions sur les négociations collectives, signatures et consultations à distance
Maître Arnaud Teissier et les équipes de Capstan Avocats se mobilisent, en association avec Livres Hebdo, pour donner chaque jour des conseils juridiques liés aux nouvelles mesures gouvernementales concernant la crise sanitaire que traverse le pays. Aujourd'hui, les modalités et précisions pour qu'une entreprise puisse fonctionner avec des employés souvent confinés ou en télétravail.
Par
Livres Hebdo
avec Capstan avocatsCréé le
01.04.2020
à 20h01
Le module questions/réponses pour les entreprises et les salariés mis en ligne sur le site du ministère du Travail (mis à jour le 31 mars) comporte désormais des précisions et préconisations concernant les règles de négociation collective, de signature et de consultation à distance.
Pour rappel, la loi d'urgence n° 2020-290 du 23 mars 2020 pour faire face à l'épidémie de Covid-19 habilite le gouvernement à prendre par ordonnances toute mesure ayant pour objet de modifier les modalités d'information et de consultation des instances représentatives du personnel, notamment du Comité social et économique, pour leur permettre d'émettre les avis requis dans les délais impartis, et de suspendre les projets.
Quel est le rôle du Comité social et économique, et dans quel cas dois-je l'informer ou le consulter ?
Le CSE joue un rôle particulièrement important dans les situations de crises.
Il devra ainsi être associé à la démarche d’actualisation des risques et consulté sur la mise à jour du document unique d’évaluation des risques.
a) Information et consultation du CSE
Le CSE a pour mission de promouvoir la santé, la sécurité et l’amélioration des conditions de travail dans l’entreprise. Par ailleurs, dans les entreprises de plus de 50 salariés, le CSE est informé et consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, notamment sur la durée du travail ou les conditions d’emploi, de travail et de formation professionnelle ainsi que sur tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail.
C’est le cas pour :
les modifications importantes de l’organisation du travail ;
le recours à l’activité partielle ;
les dérogations aux règles relatives à la durée du travail et aux repos.
Pour ces matières, les décisions de l’employeur doivent être précédées du recueil de l’avis du CSE. Le CSE doit être informé de la tenue de la réunion au cours de laquelle il sera consulté au moins trois jours à l’avance.
Le recours à la visioconférence est encouragé si nécessaire pour éviter les contacts physiques et si l’urgence l’exige, l’employeur peut prendre des mesures conservatoires d’organisation du travail avant d’avoir effectué la consultation.
b) Réunions à la demande des représentants du personnel
Le comité peut être réuni à la demande motivée de deux de ses membres, sur des sujets relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail.
c) Le droit d’alerte du CSE
Si un membre du CSE constate qu’il existe une cause de danger grave et imminent, notamment par l’intermédiaire d’un salarié qui a fait jouer son droit de retrait, il en avise immédiatement l’employeur ou son représentant et consigne cet avis par écrit sur un registre prévu à cet effet.
Il est alors fait application de la procédure prévue aux articles L. 4132-2 et suivants du Code du travail.
Les réunions de négociation collective peuvent-elles se tenir en présentiel pendant l'épidémie de Covid-19 ?
S’il y a un caractère d’urgence à la négociation (respect du calendrier législatif ou conventionnel des négociations, nécessités liées à la réponse à la crise sanitaire) et que la réunion des négociateurs peut être organisée en respectant les consignes de sécurité sanitaire et les gestes barrières, ces derniers peuvent bénéficier de l’autorisation de déplacement dérogatoire, au même titre que les salariés dont l’activité n’est pas compatible avec le télétravail et qui doivent se rendre sur leur lieu de travail.
Néanmoins, compte tenu du contexte d’épidémie, il est recommandé à toutes les entreprises et branches professionnelles d’organiser, en cette période de crise sanitaire, les réunions de négociation collective à distance.
Les réunions de négociation collective peuvent-elles se tenir en vidéo-conférence ou en audioconférence pendant l'épidémie de Covid-19 ?
Le principe de loyauté de la négociation collective impose que les négociations soient menées collectivement. L’ensemble des parties à la négociation doivent être convoquées aux réunions, sous peine de nullité de l’accord (cass. soc. 12 oct. 2006, no 05-15.069) et, si des réunions bilatérales sont possibles (CE 4 juil. 2012, no 337698), les étapes essentielles de la négociation doivent se dérouler en présence de toutes les parties à la négociation (à l’exclusion de celles ayant été régulièrement convoquées et ayant refusé d’y participer). Il est ainsi nécessaire que les représentants de salariés puissent s’exprimer et débattre en présence de l’ensemble des parties.
Rien ne s’oppose donc à ce que l’ensemble des parties à la négociation soient convoquées pour participer à une réunion de négociation par voie de visioconférence ou, à défaut, d’audioconférence, pour autant que les conditions dans lesquelles elle se déroule permettent de respecter le principe de loyauté de la négociation.
D’un point de vue pratique, de nombreuses solutions en ligne existent désormais pour organiser des visioconférences réunissant un nombre relativement important de personnes.
Les accords collectifs peuvent-ils être signés à l'aide d'une signature électronique?
Les entreprises et les branches professionnelles peuvent mettre en place un dispositif de signature électronique répondant aux exigences du règlement européen n° 910-2014 et de l’article 1367 du code civil – à savoir : être liée au signataire de manière univoque, permettre d’identifier le signataire, avoir été créée à l’aide de données de création de signature électronique que le signataire peut, avec un niveau de confiance élevé, utiliser sous son contrôle exclusif, être liée aux données associées à cette signature de telle sorte que toute modification ultérieure des données soit détectable. Cette solution est parfaitement sûre juridiquement, une signature électronique délivrée par un prestataire de services de certification électronique ayant la même valeur qu’une signature manuscrite.
De nombreux prestataires en ligne proposent désormais un service payant de signature électronique (entre 20 et 50 euros par utilisateur pour un mois).
Existe-t-il d'autres modalités de signature à distance pour ces accords pendant l'épidémie de Covid-19 ?
Du fait des circonstances exceptionnelles liées à l’épidémie de Covid-19, il est possible d’envoyer le projet soumis à signature à l’ensemble des parties à la négociation afin que chacune le signe manuellement.
Si les signataires disposent de moyens d’impression : ils impriment le projet, le paraphent et le signent manuellement puis le numérisent (ou prennent en photo chaque page avec leur téléphone en s’assurant que le document soit lisible) et renvoient le document signé ainsi numérisé par voie électronique.
S’ils ne disposent pas de moyens d’impression : un exemplaire du projet d’accord soumis à signature à chaque partie à la négociation peut être envoyé par courrier ou porteur. Une fois l’exemplaire reçu, chaque signataire peut signer et parapher puis numériser (ou prendre en photo) le document et le renvoyer par voie électronique.
Il est préférable que les signatures de l’ensemble des parties figurent sur le même exemplaire. Si cela n’est pas possible, l’accord ainsi signé sera constitué de l’ensemble des exemplaires signés par chaque partie. En ce qui concerne les accords d’entreprises, les accords ainsi signés pourront être déposés via la téléprocédure, à condition de regrouper l’ensemble des exemplaires signés en un seul fichier pdf.
Enfin, une organisation peut donner mandat à une autre pour signer un accord collectif. Ainsi, par exemple, une organisation syndicale de salariés peut donner mandat à une organisation professionnelle d’employeurs ou un employeur pour signer un accord collectif. Dans ce cas, l’organisation syndicale peut définir précisément dans son mandat la version du projet d’accord qui emporte son consentement ou pour lequel elle donne mandat à l’organisation professionnelle ou à l’employeur. Cette dernière solution présente l’avantage d’une forme souple. Il est recommandé que le mandat soit écrit pour en faciliter la preuve, mais il peut résider en un simple mail pour autant que l’on puisse en identifier l’auteur.
Est-il possible de consulter les salariés à distance pendant l'épidémie de Covid-19 ?
Du fait des risques sanitaires liés à l’épidémie de Covid-19, il est recommandé de ne pas réunir l’ensemble des salariés pour recueillir leur approbation à l’occasion d’une consultation.
Un dispositif électronique de recueil de l’approbation des salariés à distance peut cependant être mis en place, dans les entreprises de moins de onze salariés dépourvues de délégué syndical (art. L. 2232-21 du Code du travail) ainsi que dans les entreprises de onze à vingt salariés dépourvues également de membre élu de la délégation du personnel du CSE (art. L. 2232-23).
Ce dispositif doit garantir deux éléments fondamentaux : la confidentialité du vote et l’émargement des personnes consultées, afin d’éviter le vote multiple. En effet, à la différence des représentants de salariés, les salariés faisant l’objet d’une consultation ne sont pas des salariés protégés. C’est pourquoi les dispositifs de consultation, à l’exception de ceux liés à la participation, l’intéressement et l’épargne salariale, (conclus dans les conditions mentionnées aux articles L. 3312-5 et L. 3322-6) prévoient impérativement la confidentialité des votes.
Afin de garantir l’intégrité du vote, les entreprises sont encouragées à joindre un récapitulatif de l’opération de vote électronique émis par le prestataire lors du dépôt de l’accord.
Des outils de sondage disponibles en ligne (Helios) ainsi que des prestataires proposent des solutions permettant d’assurer tant la confidentialité du vote que l’émargement des votants.
Existe-t-il une procédure adaptée pour le dépôt d'un accord de branche ?
Du fait des circonstances exceptionnelles liées à l’épidémie de Covid-19, la procédure de dépôt des accords de branche est adaptée.
Les branches doivent en priorité déposer leur accord par voie électronique à l’adresse depot.accord@travail.gouv.fr en ajoutant aux pièces habituellement requises (version word anonymisée et justificatifs de notification de l’accord aux organisations syndicales représentatives) une version PDF de l’accord signé (ou une version de l’ensemble des exemplaires signés par chacune des parties s’il n’a pas été possible de faire figurer l’ensemble des signatures sur le même exemplaire).
L’accord sera enregistré dès réception des pièces transmises par voie électronique. Le dépôt papier de l’original signé de l’accord pourra être effectué postérieurement au dépôt de la version électronique.
Lors du dépôt électronique d’un accord conclu en application des ordonnances du 25 mars 2020, il est conseillé à la branche de préciser dans l’objet de son mail « accord ordonnances Covid-19 » afin que l’accord soit enregistré en priorité. Il convient de préciser également si l’extension de l’accord est demandée.
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Contact : Maître Arnaud Teissier bkoulibaly@capstan.fr /0144959587
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