Nobel de littérature

Mort de Sara Danius, ex-secrétaire perpétuelle de l’Académie suédoise

Sara Danius - Photo Frankie Fouganthin/CC BY-SA 4.0

Mort de Sara Danius, ex-secrétaire perpétuelle de l’Académie suédoise

Elle a été la première femme à être nommée au poste de secrétaire perpétuelle de l’institution qui décerne le Nobel de littérature.

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Par Nicolas Turcev,
Créé le 14.10.2019 à 16h00

L'essayiste Sara Danius, première femme devenue secrétaire perpétuelle de l'Académie suédoise, qui décerne le prix Nobel de littérature, est décédée samedi 12 octobre des suites d’un cancer du sein, à l’âge de 57 ans. Elle se trouvait à la tête de l'institution quand y a éclaté, en 2018, un scandale d'agressions sexuelles visant le français Jean-Claude Arnault, marié à une académicienne. La remise du prix Nobel de littérature 2018 avait dû être reportée d’un an.
 
La mort de Sara Danius survient ainsi deux jours seulement après l'attribution par le comité Nobel de l'Académie suédoise du prix de littérature 2018 à la Polonaise Olga Tokarczuk, et le prix 2019 à l'Autrichien Peter Handke.

Le grand écart entre Dylan et Ishiguro
 
Professeure de littérature à l'université de Stockholm, Sara Danius était entrée à l'Académie en 2013 et en était devenue deux ans plus tard la secrétaire perpétuelle, première femme à ce poste depuis la création de la "Svenska Akademien" en 1786. Cette fonction prestigieuse a fait de cette intellectuelle passionnée de mode la voix et le visage de l'Académie lors de l'annonce du Nobel de littérature devant les caméras du monde entier entre 2015 et 2017. En février 2019, Sara Danius avait annoncé qu'elle rendait définitivement son fauteuil à l'Académie.
 
Elle a ainsi présidé au sacre de la Bélarusse Svetlana Alexievitch, mais surtout à celui du chanteur américain Bob Dylan, un choix assumé par Sara Danius mais qui avait suscité de vives réactions dans le monde des lettres. En octobre 2017, l'Académie avait attribué le prix Nobel à l'écrivain britannique Kazuo Ishiguro, perçu comme l'expression d'un retour à l'orthodoxie pour un cénacle chahuté tant en ses murs qu'à l'extérieur.

Scandale nordique
 
Mais quelques semaines plus tard, en plein mouvement #MeToo, 18 femmes accusaient de harcèlement et d'agressions, dans une tribune publiée par le quotidien de référence Dagens Nyheter, une personnalité influente de la scène culturelle suédoise : le français Jean-Claude Arnault. Marié à une académicienne, le septuagénaire recevait également de généreux subsides de l'Académie, se vantait d'en être le "19e membre" et, selon des témoins, soufflait le nom des futurs lauréats du Nobel à ses amis.
 
Le scandale avait mis au jour le fonctionnement opaque de l'Académie, les rivalités entre ses membres, les forces du "patriarcat" à l'œuvre en son sein selon les soutiens de Sara Danius, et la culture du silence qui protégeait le Français. L'Académie suédoise a depuis connu une hémorragie de membres. Mme Danius avait elle-même abandonné ses prérogatives de secrétaire perpétuelle en avril 2018 tout en conservant son fauteuil.
 
Privée du quorum de membres siégeant prévu dans ses statuts pour désigner un lauréat, l'institution avait dû reporter l'annonce du Nobel 2018 d'un an, pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale.
 
Depuis les postes vacants ont été pourvus et les statuts de l'Académie réformés.

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