Dans deux courriers adressés à Clément Beaune, secrétaire d’Etat chargé des affaires européennes, puis à Roselyne Bachelot, ministre de la Culture, ces organisations professionnelles réclament notamment une série d’ajustements et clarifications au projet de législation européenne sur les services numériques, ou « Digital Services Act » (DSA). Le texte prévoit de réviser la direction e-commerce de 2000, en particulier en définissant les conditions de retrait des contenus illégaux en ligne.
Bouclier antipiratage trop fragile
Mais au goût du SNE, de la SGDL, du SLF et du SDLC, le projet dans son état actuel ne va pas assez loin dans la lutte contre le piratage des livres sur Internet. Ces organisations rappellent que « les plateformes, visées par les mesures les plus significatives du règlement, ne représentent qu’une minorité des cas de piratage de livres ». A leurs yeux, le texte serait inefficace pour empêcher les contenus contrefaisants d’apparaître et réapparaître régulièrement sur Internet. Les signataires réclament en conséquence une extension des mesures du DSA « à un maximum d’intermédiaires en ligne, plutôt que de mettre en place de nouveaux motifs d’exemption de responsabilité. » Ils demandent en particulier l’extension de l’obligation de vérifier l’identité des vendeurs, craignant que celle-ci soit limitée aux seules market places des plateformes.
Pour améliorer la lutte contre le piratage, les signataires demandent également que soit élargi aux auteurs et à leurs éditeurs le système de « signaleurs de confiance » dont les notifications devraient être traitées en priorité et permettre de prendre des « mesures dissuasives vis-à-vis des utilisateurs récidivistes. » Dans sa mouture actuelle, le projet n’accorde cette possibilité qu’aux seuls organismes représentant un intérêt collectif.
Plateformes et market places
Enfin, les courriers mettent l’accent sur la sécurisation des principes posés par la « directive droit d’auteur » de 2019 afin d'éviter la mise en place d’une « nouvelle exception pédagogique, dont les conséquences seraient particulièrement dommageables pour l'édition scolaire et universitaire, et donc pour la qualité de l’enseignement. »
Autre point de préoccupation de l’interprofession, le projet de législation européenne sur les marchés numériques, ou « Digital Market Act » (DMA), vise pour sa part à empêcher les pratiques déloyales des grandes plateformes d’e-commerce. Les signataires redoutent que les obligations applicables aux plateformes en matière de concurrence dans le secteur de la vente de livres ne concernent que leurs market places, autrement dit quand elles opèrent en tant intermédiaire. Ils appellent donc à une « clarification » sur le sujet, « y compris lorsque la plateforme intervient directement en tant que vendeur. »
Enfin, la question de rendre « effectif le principe d’interopérabilité sur le marché du livre numérique » et de ne plus enfermer les lecteurs dans des écosystèmes fermés est également soulevée dans les deux courriers.
« La France s'étant donné pour objectif de faire adopter ces deux règlements avant le terme de sa présidence de l’Union européenne, il nous paraît essentiel, compte tenu de l'état des discussions en cours sur ces deux textes, qu’elle s’engage personnellement en faveur d’une protection plus efficace du droit d’auteur sur l'internet et de conditions de concurrence plus équilibrées entre les différents canaux de vente de livres, en portant une position ferme au Conseil de l'Union européenne », concluent les signataires.
Une première version des projets de législation DSA et DMA doit être présentée le 9 décembre en commission au Parlement européen et pourrait être votée début 2022.