Interview

Pierre Lemaitre: "je regarde les films sous l’angle narratif"

Pierre Lemaitre - Photo Bruno Charoy

Pierre Lemaitre: "je regarde les films sous l’angle narratif"

Le Goncourt 2013, coprésident du jury du 6e Champs-Elysées Film Festival qui se tiendra du 15 au 22 juin, évoque pour Livres Hebdo son rapport au cinéma, ses adaptations et l’avantage d’être un écrivain dans un jury de cinéphiles.

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Par Cécilia Lacour,
Créé le 14.06.2017 à 19h00

La 6e édition du Champs-Elysées Film Festival, qui a lieu du 15 au 22 juin, fait la part belle au cinéma indépendant français et américain. Douze films, six pour chaque pays, sont mis en compétition.
 
Au jury cette année, coprésidé par le réalisateur et producteur américain Randal Kleiser (Grease) et par l’écrivain français Pierre Lemaitre, on retrouvera les acteurs Lolita Chammah, Lola Créton, Jérémie Elkaïm, Gustave Kervern, Karidja Touré, la chanteuse et actrice Camélia Jordana ainsi que Vincent Dedienne, comédien, humoriste et auteur de Les bios (très) interdites (Flammarion, 2016).
 
Pierre Lemaitre, l’auteur d’Au-revoir là-haut (Albin Michel), prix Goncourt 2013, a accordé un entretien à Livres Hebdo au bistrot La Jolie Bohême, sa "cantine", située dans le 18e arrondissement de Paris.

Livres Hebdo: C’est la première fois que vous êtes président du jury d’un festival de cinéma, pourquoi avoir accepté?
Pierre Lemaître. J’ai accepté pour trois raisons. J’ai une actualité très cinématographique en ce moment (avec notamment la sortie, mi-octobre, de l’adaptation d’Au revoir là-haut, ndlr). De plus, le festival est consacré au cinéma indépendant, que je soutiens fortement. Enfin, la personnalité de Sophie Dulac, la fondatrice du festival, me plaît. C’est l’une des rares personnes du cinéma à avoir trois casquettes: productrice, distributrice et exploitante de salles. Je ne la connais pas, donc je ne lui dois rien, mais je voulais rendre hommage à cette personne originale dans le métier.  
 
Quel sera votre rôle?
Je vais faire figure de patriarche au sein du jury, composé de jeunes artistes, qui vont voir douze films en une semaine. Mon rôle sera d’établir une bonne communication entre eux au moment des délibérations. On m’a aussi expliqué que j’ai droit à une voix double pour départager les films en compétition. J’espère ne pas avoir à l’utiliser car cela signifiera que le jury n’est pas d’accord. Et dans ce cas, j’aurais mal travaillé.
 
Que pensez-vous apporter en tant qu’auteur face à des personnalités du cinéma?
Quelqu’un comme Gustave Kervern (acteur et réalisateur, également membre du jury, ndlr) regarde un film en tant que professionnel, avec un prisme. Il va faire attention à l’écriture du scénario et au jeu des acteurs. En tant que romancier, je regarde les films sous l’angle narratif. Je sais raconter des histoires alors je vais attacher de l’importance à cela.
 
Quel genre de films aimez-vous?
Je ne suis pas un grand cinéphile, je ne regarde pas 200 films par an ! Tout au plus, j’en regarde 50. Je ne connais pas tous les acteurs, tous les réalisateurs… Mais je suis bon public. J’aime regarder des mélodrames, des films d’auteurs, des documentaires, et encore plus les films d’action et les thrillers. A partir du moment où une histoire est bien racontée, je peux regarder n’importe quoi. Je suis capable d’adorer un film avec beaucoup de faiblesses. C’est pareil pour la littérature. Je peux aimer un livre mauvais et ne pas aimer un très bon ouvrage.
 
Vous écrivez également les scénarios des adaptations de vos livres, comme Au revoir là-haut. Comment se passe le processus d’écriture?
Pour Au revoir là-haut, qui sortira en salles mi-octobre, j’ai simplement contribué à jeter les bases de l’histoire. Qui aurait le culot de dire à un artiste comme Albert Dupontel (réalisateur, scénariste et acteur du film, ndlr) "Je vais écrire le scénario" ? Je suis cependant en train d’écrire le scénario de Cadres noirs, (paru chez Calmann-Lévy en 2010 et réédité au Livre de poche en 2013, ndlr), qui avait reçu le prix du polar européen. Le roman sera adapté en une série diffusée sur Arte. Je trouve ce défi formateur. Un roman et un film ont une grammaire différente. Un roman permet d’être dans la tête des personnages. Dans un film, il faut inventer des images pour montrer ce qu’il y a dans la tête de quelqu’un. Cela m’oblige à remettre mon livre en perspective. Et en même temps, m’essayer au scénario me pousse à me poser des questions sur l’utilité de certains passages de mes futurs romans.
 

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