Au fil de trois ateliers, les quelque quarante éditeurs français, éditeurs américains et représentants de plusieurs grands musées américains présents se sont interrogés sur la perception de l'édition d'art française aux Etats-unis ; ils ont confronté leurs stratégies pour l'édition numérique et réfléchi, entre cessions de droits et coéditions, aux meilleures formes de partenariat.
"Pourquoi le livre d'art français est-il sous-représenté aux Etats-Unis ?, s'est demandé Sharon Helgason Gallagher, P-DG de la maison d'édition Artbook et de DAP, qui distribue une grande partie de l'édition muséale américaine. D'abord parce que l'édition d'art est une goutte d'eau dans l'économie de l'art, ensuite parce que les Français sont peu présents parmi les grands noms comme parmi les collectionneurs d'art contemporain", a-t-elle estimé. "Les impressionistes, socle pour l'édition française, sont déjà casés, ils ont été trop publiés", précise-t-elle.
Problème logistique
Bernard Bonnet, acheteur livres du Museum of Fine Arts de Houston (Texas) considère aussi que les difficultés pour l'exportation de livres d'art français au Etats-Unis viennent moins des textes français que de l'artiste. Toutefois, pour lui, "il y a aussi un problème logistique : commandes, distribution, facturation. J'ai la chance d'être francophone et d'avoir une expérience de libraire en France, mais comment un libraire américain peut-il gérer, par exemple, des demandes de remboursement pour des livres arrivés abîmés."
Acheteuse livres du Metropolitan Museum de New York, Marilyn Jensen fait cependant observer qu'elle est "peu sollicitée par les éditeurs français". Et Norman Laurila, son collègue du Moma, également à New York, souligne que "les prix publics des livres français sont souvent hors marché".
L'euro trop fort
"Le dollar est relativement faible par rapport à l'euro", rappelle Sharon Helgason Gallagher. "Les éditeurs français doivent comprendre qu'au delà de Brest, le monde n'est pas français et qu'ils doivent adapter leurs prix, insiste Bernard Bonnet. Dans un contexte d'euro trop fort, une remise de 30 % est très insuffisante pour un libraire américain, qui doit pouvoir disposer de marges pour discounter comme tout le monde le fait ici, ne serait-ce que pour les mécènes, les salariés et les membres des associations d'amis des musées."
Avant que Sherri Aldis (Le Chêne) et David Fabricant (Abbeville Press) ne confrontent leur vision des échanges de droits, Charles Kim, éditeur associé au Moma, et Nicolas Roche, directeur éditorial des éditions du Centre Pompidou ont pu constater que les démarches américaine et française en matière d'édition numérique étaient moins éloignées dans l'édition d'art, où elles restent encore souvent expérimentales, qu'en littérature générale.