Arrêtée le 17 août 2016 pour "propagande" et "appartenance à une organisation terroriste", à cause de ses chroniques parues dans le journal prokurde Ozgür Gündem, Asli Erdogan a été remise en liberté sous contrôle judiciaire le 22 décembre 2016. Elle a pu recommencer à voyager à partir de septembre 2017 lorsqu’elle a récupéré son passeport.
"Le 10 mars sera une audience importante, ce sera la lecture du verdict", a annoncé la romancière à l’assemblée attentive. Asli Erdogan a rappelé alors l’extrême fragilité de sa liberté actuelle: "Au moins je ne serai pas présente au moment de la lecture du verdict. Ça peut être n’importe quoi, de la prison à vie à l’acquitement."
Les lectures d’extraits de ses chroniques et du Bâtiment de pierre, roman où elle évoque l’expérience douloureuse de la prison, ont été l’occasion de rappeller l’alarmante situation de la Turquie au regard de la liberté d’expression. "La Turquie n’est plus une démocratie. Elle a franchi beaucoup de lignes rouges, a déclaré Asli Erdo?an sur un ton grave. Il y a aujourd’hui 100 000 personnes emprisonnées. C’est un signal extrêmement fort. Reste à savoir si l’Europe l’accepte ou non", a-t-elle conclu sous les applaudissements.
Son discours sur les persécutions des intellectuels en Turquie faisait écho à celles subies par l’écrivain camerounais Patrice Nganang, également présent lors de cette rencontre au CNL. En décembre 2017, l’auteur de Temps de chien (Serpent à plumes, 2003) était arrêté par les autorités après un message posté sur Facebook où il menaçait le président Paul Biya. Après un procès "irrégulier", comme le qualifie son avocat Me Emmanuel Simh, il a été relaxé et expulsé aux Etats-Unis. "Le changement a du bon. Ce soir, j’aurais dû être en prison", ironise l’écrivain en parlant de son procès qui devait avoir lieu le 19 janvier.