11 février > Roman Irlande

C’est une famille anglaise normale sur laquelle la tragédie s’abat puis s’acharne. Rosalie et Luke Douglas ont deux enfants sans problème, une jolie maison avec jardin dans la grande banlieue de Londres, des boulots séduisants (lui, caméraman pour le département d’histoire naturelle de la BBC, elle, experte en BD vintage). Mais tout se disloque lorsque Rob, leur fils de 18 ans, se noie accidentellement en Thaïlande. Six mois après le drame, sa sœur Maddie, 15 ans, s’est métamorphosée en une adolescente ingérable. Les parents, désormais séparés, sont démunis et impuissants devant cette jeune fille méconnaissable qui, par d’énigmatiques allusions, s’accuse de porter la responsabilité de la mort de son frère. Sur les conseils du meilleur ami de Rosalie, un prêtre catholique et psychologue, mère et fille se joignent à un groupe de parole où elles rencontrent Jed, un jeune homme à la beauté stupéfiante que Rosalie voit très vite en sauveur. Mais en même temps qu’il redonne le goût de vivre à la fille, il éveille aussi des sentiments troubles chez la mère. Fils de remplacement ? Objet érotique défendu ? Le garçon en tout cas s’impose dans le quotidien de la famille et révèle peu à peu, derrière son masque d’ange, un visage d’imposteur monstrueux. Le roman vire alors à l’angoissant thriller psychologique.

Comme dans Un autre amour (2010, disponible chez Folio), Kate O’Riordan ausculte avec un art très maîtrisé des dialogues les dilemmes intérieurs, les solidarités fragilisées qui subsistent dans les couples en crise. Comme souvent dans ses histoires, les personnages cachent une blessure sociale - Rosalie, élevée en HLM à Manchester par une mère seule, reconnaît chez Jed un complexe de classe qui lui est familier. A cette dimension sociale, la romancière irlandaise ajoute une réflexion religieuse sur la culpabilité et la rédemption. Véronique Rossignol

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