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Gallimard en star au Festival de Cannes

Léa Seydoux et Denis Podalydès dans "Tromperie" d'Arnaud Desplechin, adapté du roman de Philip Roth - Photo Shanna Besson - Why Not Productions

Gallimard en star au Festival de Cannes

Avec neuf adaptations dans la sélection officielle du Festival de Cannes, Gallimard est en vedette dans les génériques de films. Rencontre avec Frédérique Massart, directrice des droits audiovisuels et spectacles vivants de la maison, présente sur la Croisette à l’occasion de Shoot the Book !, où elle proposait un livre méconnu d’Albert Camus.

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Par Vincy Thomas, Cannes
Créé le 11.07.2021 à 11h12

Neuf films de la sélection officielle du 74e Festival de Cannes sont des adaptations de livres publiés chez Gallimard. Un record pour un éditeur. Directrice des droits audiovisuels et spectacles vivants, Frédérique Massart était présente vendredi 9 juillet pour les speed meetings de Shoot the Book !, l’événement initié par la Scelf avec ses partenaires habituels et qui, cette année, se tenaient au Marché du film.

Le pari Camus

La maison présentait aussi jeudi 8 juillet, dans le cadre des pitchs, La mort heureuse d’Albert Camus. "C’est un livre que j’aime beaucoup, pas très connu… Il ne s’est vendu qu’à 115 000 exemplaires. Je trouve que ça pourrait faire un très grand film, avec un propos universel, qui pourrait être adapté n’importe où", s’enthousiasme la directrice.

Après une année de sessions virtuelles, retour aux rencontres réelles. Le format Shoot the Book ! permet "une belle exposition", selon ses propres mots. "Le confinement a permis de mieux suivre les projets en développement, de mieux suivre les livres qu’on envoyait aux producteurs aussi. Mais c’est plus difficile quand on ne les connaît pas."

À Cannes, elle est particulièrement attentive aux adaptations de la maison qui sont projetées sur la Croisette. Ravie de voir une telle visibilité pour les publications de Gallimard, elle note que ce sont surtout des titres de la collection "Du monde entier" qui se retrouvent cette année en pleine lumière sur la Croisette. "C’est fou", reconnaît-elle. "Je n’ai pas d’explications, d’autant que ce ne sont pas tous des ouvrages récents. Il y a beaucoup de fonds." Et d’ajouter : "J’ai l’impression qu’il y a une envie d’adapter des ouvrages marquants, qui incarnent quelque chose de très fort."

Roth et Tesson

Parmi les événements, dans la sélection Cannes Premières, il y a Tromperie d’Arnaud Desplechin, d’après le roman éponyme de Philip Roth. "C’est très bien. J’ai beaucoup aimé sa version", avoue-t-elle. "Je me suis occupé des droits sur la traduction française et j’ai fais du go between avec l’agent." Mais, pour beaucoup d’entre eux, les droits n’étaient pas entre ses mains, citant notamment Compartiment n°6, film finnois de Juho Kuosmanen en compétition et adaptation du roman éponyme de Rosa Liksom, ou Tre piani, film italien de Nanni Moretti d’après Trois étages, le roman d’Eshkol Nevo. "Dans ce cas, je n’ai rien à faire." Même le livre d’Emmanuèle Bernheim, Tout s’est bien passé, adapté sagement mais efficacement par François Ozon, avec Sophie Marceau dans le rôle de l’écrivaine, a été négocié directement avec l’agent.
 
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"Mais ça nous ravit, parce que ça nous positionne et ça démontre que nos éditeurs sont très bons", explique-t-elle. Frédérique Massart a cependant travaillé sur le contrat de La panthère des neiges, adaptée du gros best-seller de Sylvain Tesson et prix Renaudot 2019. Ce documentaire, réalisé par Marie Amiguet, est présenté dans la sélection éphémère de films sur l’environnement.
 
En course pour la Palme d’or, on retrouve aussi Benedetta de Paul Verhoeven (Sœur Benedetta, entre sainte et lesbienne, biographie de Judith C. Brown) et France de Bruno Dumont (Par ce demi-clair matin, recueil de Charles Péguy), même si le réalisateur se défend aujourd’hui de l’avoir adapté comme la production l’indique depuis le lancement du projet. Hors compétition, il y a également Mothering Sunday d’Eva Husson (Le dimanche des mères, roman de Graham Swift).
 
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Le format plus que le support
 
Malgré la crise sanitaire, la fermeture des salles de cinéma durant des mois, les projets de films ou de séries n’ont jamais été aussi nombreux. Il y a cependant quelques changements dans la manière d’aborder les contrats. Des clauses de confidentialité apparaissent. Les producteurs prennent désormais des options sur tous les supports audiovisuels, pour s’offrir la possibilité de les exploiter en salles ou sur les plateformes. Tout devient plus segmenté aussi. Le cinéma s’intéresse surtout "au vivre ensemble et à la comédie, tandis que, pour la télévision, il faut des sujets sociétaux au message très clair, du young adult pour Amazon, du patrimoine revisité pour Netflix, etc." Avec son catalogue (Gallimard, Denoël, Futuropolis), elle "a plus d’ouvertures pour les producteurs qui cherchent des projets pour des cinéastes spécifiques".
 
Selon Frédérique Massart, "la différence ce n’est plus tellement cinéma et plateforme, ou télévision, c’est plutôt unitaire ou série". "Si on a signé plus de séries que d’habitude, on garde une forte proportion de projets de cinéma d’auteur, ce qui correspond à notre fonds", ajoute-t-elle. "La série est intéressante pour certains livres. Un film réduit parfois le roman, et, quand il est bon, c’est très difficile de faire mieux à l’écran. La série correspond à une forme romanesque où on prend le temps de l’exposition."

La prochaine étape de sa tournée des sera d’ailleurs à Lille, pour Séries Mania, à la fin d’août. Par la suite, elle attend avec hâte le Shoot the Book ! de Busan en Corée du Sud, marché à fort potentiel, et espère retourner à celui de Mumbay en Inde, où elle a rencontré des producteurs sérieux, agréables, clairs dans leurs démarches. Elle a d’ailleurs signé là-bas une option pour l’adaptation d’un roman graphique fantastique paru chez Futuropolis.

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