Justice

Erri De Luca relaxé

Erri de Luca au tribunal de Turin ce lundi 19 octobre 2015 - Photo Rai TV

Erri De Luca relaxé

Au terme de la dernière audience de son procès, lundi 19 octobre à Turin, l'écrivain italien, accusé d'"incitation au sabotage" par la société franco-italienne LTF, a été relaxé.

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Par Marine Durand,
Créé le 19.10.2015 à 15h33

Erri De Luca n'ira pas en prison. L'écrivain italien de 65 ans a été relaxé par le tribunal de Turin, lundi 19 octobre. Il était accusé d'“incitation au sabotage" du chantier du tunnel ferroviaire Lyon-Turin par la société franco-italienne LTF, et encourait huit mois de prison ferme. “Le délit n'est pas constitué”, a dit la présidente Immacolata Iadeluca. Le verdict, révélé peu après 13 heures, a suscité une explosion de joie de la part de ses partisans. Les attendus de cette décision ne seront pas connus avant plusieurs semaines.

Dans une déclaration au tribunal de quelques minutes plus tôt dans la matinée, Erri De Luca avait répété qu'il considérait "le verbe saboter (comme) noble et démocratique". "Je défends l'origine du mot saboter dans son sens le plus efficace et le plus vaste. Je suis prêt à subir une condamnation pénale pour son emploi, mais non pas à laisser censurer ou réduire ma langue italienne", avait-il ajouté d'une voix assurée. “Une injustice a été évitée”, a-t-il brièvement commenté peu après le verdict.

Un soutien hors normes

Erri De Luca est sur le banc des accusés depuis fin janvier 2015 à cause d’une interview donnée en 2013 au Huffington Post italien, dans laquelle il affirmait son soutien au mouvement NO TAV (Non au TGV), qui fait rage en Italie contre le projet de liaison rapide entre Lyon et Turin, conduit la société publique franco-italienne LTF et traversant le Val de Suse. Dans cette interview, il avait appelé à "saboter" le chantier, qu'il considère inutile et dévastateur, à la fois d'un point de vue écologique et humain.

Depuis le début de son procès, Erri De Luca bénéficie d'un soutien international dans les milieux des arts et de la culture. Lancé en mars dernier par le comité de soutien français à l'écrivain italien, emmené par le sociologue et historien Jean-Marc Salmon, l'appel "Liberté pour Erri De Luca" a été signé par près de 9000 personnes. Au total, plus de 600 éditeurs, auteurs, journalistes, acteurs, réalisateurs, élus ou avocats de différents pays ont affirmé leur soutien à Erri de Luca en signant cet appel, réclamant aux gouvernements français et italien que la plainte à son encontre soit retirée. Selon le JDD, François Hollande, qui avait déclaré lors du dernier Salon du livre de Paris que les écrivains "ne doivent pas être poursuivis pour leurs textes", a parlé d'Erri De Luca avec Matteo Renzi, le président du Conseil italien.

Edgar Morin, non-signataire mais solidaire

Lundi, l’écrivaine Camille Laurens, la comédienne Marianne Denicourt, les députées Fanélie Carrey-Conte et Anne-Yvonne Le Dain, la sénatrice Sylvie Robert ainsi qu'Éric de Chassey, ancien directeur de la Villa Médicis, ont également rejoint l'appel, tandis que le sociologue Edgar Morin, sans signer la pétition, a transmis un court texte au comité de soutien. "Je n'aurais pas employé l'expression de Erri De Luca, mais je partage son sentiment de révolte contre une civilisation prête à dégrader un milieu humain et un milieu naturel qui sont part de notre précieux patrimoine alpin, pour des impératifs économiques, financiers et chronométriques. Aussi je demande que la justice tienne compte de la justesse de sa révolte et non de la littéralité de son vocabulaire", a fait valoir l'intellectuel.


 

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