Trop méconnu en France, William Humphrey (1924-1997), écrivain du Sud américain, est à découvrir ou redécouvrir à travers ce volume de « lettres choisies » que propose la collection « Arcades ». Rappelons que Vincente Minnelli s’est inspiré de son roman L’adieu du chasseur (Folio) pour Celui par qui le scandale arrive avec Robert Mitchum. Que Vogue, dans les années 1950, l’avait classé parmi les hommes les plus séduisants du monde aux côtés de Marlon Brando et de John F. Kennedy. Que le natif de Clarksville (Texas) a signé une série de recueils de nouvelles de toute beauté comme Une neige toute fraîche (Gallimard, 1988) ou Chanson d’automne (Gallimard, 1995).

On se précipitera donc sur Loin du Texas, l’occasion de vérifier quel merveilleux épistolier fut Humphrey à qui l’éditeur Alfred A. Knopf - qui publiera L’adieu du chasseur en 1958 - disait d’ailleurs : « vos lettres sont toujours un régal ». On sera surtout ici aux premières loges pour assister au combat d’un homme totalement voué à l’écriture. Le voici d’abord en 1947. Fauché, dans un New York en pleine crise économique où il survit avec sa compagne Dorothy en se déclarant prêt à se jeter dans l’East River.

Humphrey a été ouvrier agricole, il guigne un travail dans un laboratoire de vénérologie mais va trouver à la place un emploi dans une bibliothèque. Pour l’heure, il cherche surtout à faire éditer ses nouvelles en revue, tout en négociant un à-valoir pour son premier roman. Coup d’essai pour lequel il a déjà pris d’abondantes notes mais dont il n’a pas attaqué la rédaction. La donne change quand il peut gagner vingt-huit mille dollars par an comme enseignant à Bard College. Lorsqu’il déclare à Katherine Anne Porter qu’elle a été son « seul Maître » ou encore : « Je suis bien trop fou pour être autre chose qu’écrivain. »Loin du Texas est une plongée passionnante dans la soute. Où l’on accompagne un créateur toujours sur la brèche, toujours en train de batailler avec l’écriture et les tracas de la vie quotidienne. Alexandre Fillon