Les indicateurs repassent au vert en 2024 pour le marché du livre parascolaire, après une année marquée par le ralentissement de l'activité (-4,5 % en volume et -0,8 % en valeur selon GFK). Cette inversion de tendance doit beaucoup au « choc des savoirs » annoncé en décembre dernier par Gabriel Attal. Si elle vaut à l'éphémère ministre de l'Éducation nationale, désormais Premier ministre, de s'attirer les foudres du corps enseignant, cette réforme a en revanche rendu le sourire aux éditeurs parascolaires. -- La transparence des notes, la réussite obligatoire au brevet pour entrer au lycée, le recours plus fréquent au redoublement, la constitution de classes de niveaux ou encore l'évolution des programmes de primaire constituent autant de nouveautés qui vont contribuer à remettre le parascolaire au centre du jeu. La pression sur les élèves pousse les parents à réinvestir dans des ouvrages pour assurer leur réussite à l'école. La tendance se vérifie en rayon avec, depuis le mois de janvier, une reprise des ventes, en particulier sur le segment du soutien. Alors même que le soufflet des années Covid - porté par l'école à la -maison - n'en finissait pas de retomber, la reprise arrive donc à point nommé pour les éditeurs. « Depuis décembre, nous sommes entrés dans une nouvelle séquence très positive, confirme Quentin Gauthier, directeur marketing et communication chez Univers jeunesse Nathan & Bordas. Le marché est en croissance, avec une concentration des achats à chaque période de vacances scolaires. »
Choc des savoirs
Le choc des savoirs sera aussi un choc de production. Les nouveaux programmes s'appliqueront dès septembre prochain dans les classes de la maternelle jusqu'au CE2, avant d'être étendus aux niveaux supérieurs en 2025. Et il faut aller vite : si les éditeurs attendaient toujours début avril d'en connaître les détails, ils n'en ont pas moins prévu un grand nombre de nouveaux concepts éditoriaux, sans parler de l'actualisation des contenus. Le segment du soutien est -particulièrement concerné : en août, Belin Éducation entame la refonte de sa collection « Je réussis mon... ». L'opération démarre avec les titres couvrant le CP, le CE1 et le CE2 ; elle se poursuivra avec la deuxième vague de la réforme en 2025 pour les niveaux CM1 et CM2. Bordas annonce, également en août, une nouvelle collection intitulée « Cahiers de problèmes », couvrant les cinq années de la primaire. « Il s'agit de titres dédiés exclusivement aux mathématiques et qui développent une approche méthodique pour apprendre à résoudre des problèmes de manière granulaire », explique Quentin Gauthier. En français, l'éditeur renforce également son offre de « Cahiers d'écriture » avec deux nouveautés couvrant les niveaux de grande section et de CE1, ainsi qu'un cahier conçu pour aider les lycéens à améliorer leurs prises de notes. Bordas uniformise aussi les titres de « L'année de... » et adapte leur contenu aux orientations du ministère. -- À partir de la classe de première, les ouvrages seront ainsi centrés sur les enseignements scientifiques.
Chez Hatier, l'enjeu de la rentrée sera la collection « Vive le primaire », concept inédit de tout-en-un en bande dessinée qui propose de suivre un groupe d'amis pendant leurs cinq années de primaire, du CP au CM2. « Les enfants ont envie d'avoir des ouvrages en cohérence avec leur propre expérience de l'école, indique Rachel Duc, directrice du secteur parascolaire chez Hatier. Nous leur proposons une approche rassurante et différenciante dans une scénographie qui facilite la mise au travail et un format très attractif visuellement. » Cette nouvelle offre complète les collections « Chouette » et « Tout savoir », qui seront pour leur part entièrement revues dans le cadre de la réforme des programmes. Hatier tire également un bon bilan de la collection « C'est simple avec maître Lucas » lancée en 2023, dont les titres de français et mathématiques couvrant les cinq années de la primaire seront complétés par quelques titres passerelle consacrés à la dictée et à la lecture fluide en vue d'assurer le lien avec le collège. Partageant cette approche double matière, Larousse déploie en juillet une nouvelle collection intitulée « Priorité français-maths » et elle aussi dédiée à toute la primaire.
Effort porté sur l'attractivité de la maquette
De son côté, Hachette Éducation mène depuis deux ans la refonte de la collection « Pour comprendre », couvrant la primaire et le collège, avec un effort porté sur l'attractivité de la maquette. L'éditeur publiera aussi en juillet une série de cahiers sous licence Spiderman couvrant les quatre années du CP au CM1. Intitulés Mon super-cahier de maths et de français, les ouvrages ont été pensés « pour les enfants -réfractaires à l'accompagnement », explique Nathalie Sannier-Théret, directrice du parascolaire chez Hachette Éducation. « Avec cette licence Spiderman transgénérationnelle à très forte notoriété, nous leur proposons un superhéros afin de lever le frein de l'apprentissage », poursuit-elle.
En croissance de 9 % en 2023 selon son directeur éditorial Damien Hervé, Auzou développe pour sa part une nouvelle collection de livres-jeux pour réviser le programme de l'année, intitulée « Cherche et trouve » et qui s'ouvre avec deux titres pour les niveaux de grande section et de CP. Tout aussi actif, Magnard a profité de la refonte en 2023 de sa collection phare « Cahier Jour Soir » et a complété en février « Mes fiches mémo », créée en 2020 par les enseignants des blogs Lutin Bazar et Monécole.fr, avec cinq cahiers d'exercices de français. Enfin, également en début d'année, Nathan a enrichi sa série phare de titres monomatière « Je comprends tout » avec des vidéos du réseau de formation des enseignants Canopé.
Opportunités pour les éditeurs
Les récentes annonces gouvernementales sont aussi vues comme une opportunité par l'ensemble des éditeurs sur le segment des examens, qu'il s'agisse du brevet des collèges ou du baccalauréat. « Avant, nous étions face à des lycéens qui n'avaient quasiment plus d'épreuves à passer dès le mois de mars et avaient tendance à se démobiliser, explique Turiane Guitton, directrice marketing et commerciale chez Belin Éducation. Le retour des épreuves de spécialité à la fin de l'année les pousse à reprendre les révisions. » Après avoir lancé en 2023 ses premières fiches Studygram au sein de la collection « Focus bac », Belin Éducation étend ainsi le concept à l'étude des œuvres littéraires au programme du bac de français via la série « Les clés d'une œuvre ». Hatier s'empare aussi de la formule avec Mon bac philo en study fiches, sur le même modèle que Tout mon brevet en study fiches, paru en juillet dernier et succès de librairie avec plus de 13 000 exemplaires vendus. Hatier dresse par ailleurs un bon bilan de la refonte l'an dernier de la collection « Prépabac » avec des titres enrichis en vidéos et cartes mentales animées consultables au fil des pages via un QR Code. L'éditeur poursuit sur sa lancée avec la refonte, sur le même modèle, de la collection « Prépabrevet ». Au sein des huit titres de la gamme, chaque chapitre sera désormais associé à une vidéo de révision. Enfin du côté des ouvrages de référence, 2024 est une année de « réinvention » pour Bescherelle : la marque phare d'Hatier revoit sa charte graphique et propose un logo épuré. Elle profite aussi de l'occasion pour lancer son premier imagier jeunesse.