Christophe Pérales, président de l’Association des directeurs et personnels de direction des bibliothèques universitaires et de la documentation (ADBU), réagit au texte La gratuité, c’est le vol. 2015 : la fin du droit d’auteur ?, publié par l’avocat Richard Malka, mandaté par le Syndicat national de l’édition.

"L’ADBU, association qui fédère les cadres des bibliothèques de l’enseignement supérieur et de la recherche, l’affirme sans ambages : le contenu du récent pamphlet de Richard Malka, La gratuité, c’est le vol, témoigne que son auteur n’a rien compris au text and data mining (fouille de contenus).

Selon Richard Malka, la volonté de la Commission européenne comme de la secrétaire d’Etat chargée du numérique, Madame Lemaire, d’introduire dans la législation relative à la propriété intellectuelle une exception au titre de la fouille de contenus (text and data mining) serait attentatoire au droit d’auteur, et ferait le jeu des grandes entreprises du Net.

Or il convient de le redire avec force : la fouille de contenus concerne à peine le droit d’auteur. Certes, pour fouiller, il faut disposer d’une copie des bases de données que l’on entend explorer. Mais cette copie n’est que technique, elle ne vise absolument pas à opérer une publication indue de contenus sous droits. Et il existe par ailleurs des moyens simples d’éviter toute dissémination accidentelle : le recours à des tiers de confiance par exemple, seuls habilités à procéder à la duplication des bases, et à y donner accès de façon contrôlée.

Mais surtout, le pamphlet de Richard Malka passe sous silence qu’il ne s’est jamais agi d’accéder gratuitement à des contenus protégés. Les bibliothèques universitaires paient en effet annuellement des sommes astronomiques, en constante progression (+ 7 % par an en moyenne !) pour s’abonner aux bases de revues dans lesquelles sont publiés les articles scientifiques. Et il faut en outre rappeler qu’à l’exception des publications juridiques les auteurs d’articles académiques ne sont pas payés !

On mesure alors le caractère particulièrement cocasse de l’argumentaire de Richard Malka. Il milite contre la gratuité de l’accès aux œuvres : les bibliothèques universitaires paient pour donner accès à leurs lecteurs à la production scientifique. Monsieur Malka se bat pour le droit d’auteur : les auteurs qu’il veut empêcher de lire comme ils l’entendent ne sont pas rémunérés pour leurs articles.

Dans son pamphlet, Monsieur Richard Malka dénonce à juste titre le risque d’une société orwellienne que tendent à construire les géants de l’Internet à travers l’économie du Big data. Mais vouloir contrôler la manière de lire ce qui a été légalement acquis, est-ce un contre-modèle vraiment si différent ?

Voir Livreshebdo.fr, "Le SNE en campagne contre les réformes visant le droit d’auteur".

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