Mené auprès de 132 entreprises, représentant 250 maisons, sur l'impact économique et social du confinement, l'enquête donne un aperçu partiel mais substantiel de la situation préoccupante des éditeurs, indépendants ou groupes éditoriaux, au moment de la reprise de l'activité.
Sans surprise, les flux de revenus des éditeurs se sont asséchés ces derniers mois. La moitié des sondés anticipent une baisse de chiffre d'affaires de 20% à 40% cette année par rapport à 2019. Un autre quart des maisons interrogées estiment qu'elles perdront plus de 40% de chiffre d'affaires.
Le mois d'avril, pendant toute la durée duquel le confinement a été effectif, a été le plus dur. 73% des sondés déclarent une chute de revenus supérieure à 60% sur cette période par rapport à l'année précédente. Pour le mois de mars, 63% des éditeurs accusent des pertes entre 20% et 60% de leur chiffre d'affaires. Malgré une reprise vigoureuse en librairie depuis le déconfinement, un peu plus d'un tiers des maisons anticipent un recul de 60% de leurs revenus en mai.
Des aides insuffisantes
L'impact économique du confinement aura des conséquences à moyen et long terme pour les éditeurs. Un peu plus de la moitié des participants au sondage citent des tensions sur la trésorerie et des reports ou annulations des investissements prévus. Un tiers estiment que la crise sanitaire fait peser une menace sur l'emploi dans leur structure. 18 maisons évoquent même un risque de fermeture.
Le confinement a également fortement perturbé l'activité éditoriale. En moyenne, les sondés rapportent avoir annulé ou reporté 18% de leurs nouveautés prévues en 2020. En outre, l'annulation des principales foires internationale du livre a privé les éditeurs d'une partie des revenus tirés de la cession des droits étrangers.
Pour réussir à traverser la crise, la majorité des éditeurs interrogés ont fait appel aux divers dispositifs de soutien mis en place par l'Etat et les collectivités territoriales. 72% d'entre eux ont eu recours au chômage partiel, 44% ont sollicité le report des échéances sociales et 37% ont emprunté grâce au prêt garanti de l'Etat aux entreprises, assuré à hauteur de 300 milliards d'euros. Plus de la moitié (56%) des sondés jugent néanmoins les mesures d'urgence insuffisantes et leurs montants trop faibles. Certains éditeurs pointent également du doigt des critères d'éligibilité trop restrictifs.
Pas de librairie, pas de reprise
Invités à s'exprimer sur les conditions de la reprise, la quasi-totalité (91%) des répondants s'inquiètent du redémarrage difficile des librairies et des autres points de vente. D'après les premiers retours, l'affluence en librairie s'annonçait toutefois au beau fixe sur la première semaine de déconfinement. Les autres motifs d'incertitude sont, selon les éditeurs, la demande insuffisante de la part des lecteurs (63%), le manque de ressources financières (36%) et la baisse des budgets publics pour l'achat de livres (29%).
Logiquement, les sondés préconisent dans la majorité un fort soutien de l'Etat et des collectivités locales aux librairies pour redémarrer l'activité. Ils évoquent la possibilité d'une suspension de la TVA sur le livre, des subventions pour le livre scolaire ou encore la distribution de chèques-lire. Le deuxième volet de la relance devrait se concentrer sur l'aide aux éditeurs indépendants, d'après les répondants, via l'annulation de cotisations sociales, d'aides financières sur les coûts fixes (loyer, électricité, etc) et d'un maintien temporaire du chômage partiel.
Outre ces mesures de soutien aux entreprises, les éditeurs se disent favorables à des solutions de politique culturelle plus globales comme l'adoption d'un tarif postal du livre, le lancement d'une grande commande publique de livres pour les bibliothèques et les établissements scolaires, ou encore le déploiement d'une grande campagne nationale de communication en faveur du livre et de la lecture. Des propositions qui font l'unanimité dans la profession, des éditeurs indépendants aux libraires.