Crise écologique, féminisme, démocratie, État de droit ou encore système scolaire et intelligence artificielle... Les catalogues des maisons explorent des thématiques essentielles, portés par une forte volonté d'éclairer les enjeux contemporains. Face aux bouleversements, interrogations ou combats que notre monde traverse, la rentrée des essais et documents s'attache à ouvrir des pistes de réflexion, donner des éléments de compréhension et, peut-être, susciter un engagement en faveur d'un avenir plus soutenable.
Statue de la République le 8 mars 2025. - Photo HANS LUCAS VIA AFP - BABETH ALOYPour télécharger ce document, vous devez d'abord acheter l'article correspondant.
Vert où ?
Au rayon de l'écologie, Sunil Amrith analyse l'impact humain sur la nature depuis le XIIIe siècle dans La Terre brûle (Albin Michel). De son côté, Nathanaël Wallenhorst montre concrètement « ce que le climat va faire à l'Europe » et à nos quotidiens en 2049 (Le Seuil) si les gouvernements ne changent pas leurs politiques environnementales. Dans son sillage, et sans attendre les 24 prochaines années, plusieurs autrices et auteurs continuent de tirer la sonnette d'alarme. Au Seuil toujours, Pierre Charbonnier redéfinit les liens entre écologie, actions publiques et changement social dans La coalition climat. Quentin Ghesquière montre qu'il est possible de ne plus subir les conséquences du réchauffement climatique dans S'adapter ou mourir (Rue de l'échiquier). Marie-Hélène Lafage esquisse un projet d'adaptation écologique et solidaire dans Les métamorphoses (Les petits matins). Laurent Testot et Perrin Remonté analysent Notre empreinte sur Terre (Armand Colin).
Chez L'Aube, Erwan Ruty livre un Manifeste pour une transition écologique par et pour le peuple tandis que Pierre-Etienne Franc invite à Sauver le monde pour le changer (et pas l'inverse). Christian Gollier décrypte l'Économie de l'(in)action climatique (PUF). Éric Aeschimann propose une lecture sociale et économique des inégalités environnementales dans Les vipères ne tombent pas du ciel (Les Liens qui libèrent). Jeanne Mermet met en lumière celles et ceux qui ont décidé de mettre fin à leur carrière pour ne pas alimenter un système qui détruit la planète dans Désertons ! (Les Liens qui libèrent/Wildproject).
Statue de la République le 21 avril 2022.- Photo HANS LUCAS VIA AFP - LILIAN CAZABETPour télécharger ce document, vous devez d'abord acheter l'article correspondant.
De son côté, Rutger Bregman appelle les individus à orienter leurs carrières en faveur de L'ambition morale (Le Seuil) en dépassant le seul cadre de l'écologie. À La Découverte, Julien Vitores examine les « socialisations écologiques et genèse des inégalités » des enfants et leurs parents dans La nature à hauteur d'enfants et Serge Audier explique comment Repenser l'écologie politique. Dans le catalogue d'Actes Sud, Anne-Marie Lo Presti et Sabine Oppliger présentent la nature comme un environnement propice à l'apprentissage dans À l'école du vivant, Dominique Bourg dresse les Leçons des limites planétaires et Éric La Blanche fait « l'éloge d'une émotion rebelle par temps de crise écologique » dans Oser la colère.
Une rentrée hétérogène
À chaque rentrée, les maisons dévoilent des programmes très diversifiés pour tenter de faire la différence sur les tables des libraires. La concurrence est grande. Le cru 2025 de la rentrée des essais et documents compte au 2 juin 1 424 titres selon Electre Data Services (+2 % par rapport à l'année précédente).
Derrière les grandes thématiques irriguées par plusieurs ouvrages, quelques incontournables et de nombreux inclassables. En voici quelques-uns. Henri Kermarrec met en lumière l'histoire politique du jeu de société dans Ce n'est qu'un jeu (Éditions du commun). Nicolas Kayser-Bril retrace une histoire politique et gastronomique du commerce européen des matières grasses depuis l'Antiquité dans La guerre du gras (Nouriturfu). Émilie Laystary invite à dégenrer, décoloniser et décentrer la nourriture dans Passer à table : manger est politique (Divergences).
Intersection des luttes
À l'intersection des luttes, Roméo Bondon présente Élisée Reclus & la solidarité terrestre (Le Passager clandestin) et Alice de Rochechouart appelle à repenser l'ensemble de l'organisation politique pour abolir l'ensemble des Privilèges (Nouveaux jours/Lattès). Dans Ce que l'égalité veut dire (Seuil), Thomas Piketty et Michael J. Sandel débattent des actions à entreprendre pour réduire les inégalités. Sophie Lemaître montre « comment le droit est perverti pour bâillonner médias et ONG » dans Réduire au silence (Rue de l'échiquier). Hélène Balazard et Simon Cottin-Marx s'emparent d'un phénomène peu documenté par le livre : Le burn-out militant (Payot). Michel Onfray propose le premier tome de son Histoire philosophique de l'Occident en quatre volumes intitulé Déambulation dans les ruines (Albin Michel). Amina Hassani s'intéresse à La justice du capital : quand les multinationales (dé)font la loi (La Fabrique).
Au rayon littérature avec Kolkhoze (P.O.L), Emmanuel Carrère présente également le deuxième volume de Vers le réel, ses Œuvres choisies cette fois axées autour du portrait (Quarto Gallimard). Damien Karbovnik montre combien les problèmes de société sont corrélés au Développement personnel, nouvel opium du peuple ? (Équateurs). Et Jacques Attali propose son manuel de survie Danser près de la porte et autres secrets pour mieux vivre dans un monde chaotique (Flammarion).
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Éric Servat met en avant Le grand défi de l'eau (HarperCollins). Philippe Grandcolas explique la Biodiversité. Urgence planète (Tallandier). Kilian Jörg montre comment « la voiture détruit le monde » dans Auto-destruction (Wildproject). Thomas Broquet dévoile L'oiseau des glaces (CNRS Éditions), c'est-à-dire la mouette ivoire vivant en Arctique et très confrontée aux changements climatiques. Marc Lomazzi documente le « business des crimes contre l'environnement » dans Le livre noir de la criminalité verte (Calmann-Lévy). De son côté, Réjane Sénac donne la parole aux associations qui agissent contre l'élevage intensif et met à jour les pratiques maltraitantes dans Par effraction. Rendre visible la question animale (Stock).
Égalité, égalité, égalité
Le féminisme demeure une thématique très documentée. Claudine Cohen identifie par exemple les Origines de la domination masculine (Passés composés) tandis que Heide Goettner-Abendroth étudie les Sociétés matriarcales du passé et émergence du patriarcat (Des femmes-Antoinette Fouque). Dans Être femelle (traduit par Marin Schaffner, Wildproject), Donna Haraway montre comment la science moderne repose sur des présupposés patriarcaux. Ivan Jablonka retrace La culture du féminicide (Le Seuil).
Camille Froidevaux-Metterie coordonne Théories féministes (Le Seuil) qui compile 130 articles donnant à voir l'étendue de la pensée féministe. La Meute enrichit sa collection « Permis de déconstruire » de deux nouveaux titres : Tu vas pas chialer comme une gonzesse ! de Lucile Peytavin et Elles vont finir seules avec leurs chats de Charlotte Debest.
En espérant aller mieux
Déclarée Grande Cause nationale 2025 en France, la santé mentale est au cœur de deux ouvrages. Christophe Tzourio alerte sur la dégradation de la santé mentale des jeunes dans Notre jeunesse est en danger (Michel Lafon). Mathilde Ramadier tente de comprendre comment les psychédéliques, et en particulier l'ayahuasca, pourraient permettre de soigner la dépression dans Au-delà du moi (Faubourg).
Plus largement, la santé donne un point d'appui à d'autres titres. Fabien Calvo retrace « un demi-siècle de progrès vers la guérison » des Cancers (Calmann-Lévy). Dans De l'essence dans notre assiette (La Découverte), Guillaume Coudray enquête sur la manière dont l'hexane, un produit chimique issu du pétrole jouant un rôle dans l'apparition de certaines maladies chroniques, s'est imposé dans l'industrie agroalimentaire sans que les consommateurs et consommatrices ne le sachent. Marlène Schiappa et Matthias Savignac donnent des pistes pour régler les inégalités de genre dans les parcours de soins avec Votre santé a un sexe (L'Aube).
Claudel Pétrin-Desrosiers défend dans Santé planétaire (Écosociété) une approche médicale selon laquelle notre santé ne peut être décorrélée du monde vivant. Andy Battentier, Jean-Pierre Descan, Jocelyne Le Roux, Damien Weidert et Martin Rieussec-Fournier publient également Santé planétaire, mais dans le catalogue des Liens qui libèrent, pour proposer « des solutions mutualistes » favorables à la santé publique.
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Hélène Fiche analyse Ce que le féminisme fait au cinéma (Agone) et souligne que la domination masculine subsiste dans le 7e art. Mejdaline Mhiri et Clothilde Le Coz enquêtent « sur le traitement médiatique des violences sexistes et sexuelles dans le sport » dans La zone d'impunité (Hugo Doc). Maylis Castet se demande « pourquoi les femmes se forcent encore » dans Corvée de sexe (Albin Michel). Marie Quennehen et Myriam Chatot s'interrogent également : Être un père féministe, mission impossible ? (Textuel). Violaine de Filippis-Abate dresse l'état des lieux « des femmes face au déclin de leurs droits » dans La résistance écarlate (Payot). Camille Soffer et Coline Zuber coordonnent Justice partout : outils féministes pour une justice transformatrice sans police ni prison (Le Passager clandestin).
Zones/La Découverte donne à découvrir Comment torpiller l'écriture des femmes de Joanna Russ (traduit par Cécile Hermelin), publié aux États-Unis en 1983, qui décortique le sexisme ordinaire sévissant dans le monde du livre. De son côté, Azélie Fayolle tente de fissurer le male gaze littéraire dans Vers une littérature pour les deux moitiés du monde (Divergences). Angela Davis, Silvia Federici et Patricia Hill Collins, trois figures du féminisme outre-Atlantique interrogent L'effondrement de la démocratie (traduit par Virgile Dell'Armellina, Divergences).
(Géo)politique
À l'approche des élections municipales (mars 2026) et présidentielles (2027), plusieurs programmes se teintent de couleurs politiques. Pierre Leroy, Karine Banderier et Albane Roussot proposent aux candidats aux élections municipales un Petit manuel de démocratie vivante (Actes Sud). L'écrivain et éditeur Hugues Jallon décrypte la montée du fascisme dans Le temps des salauds (Divergences). Laurent Mauduit enquête sur les liens entre extrême droite et milieux d'affaires dans Collaborations (La Découverte). « Et si on s'y prenait autrement pour faire reculer l'extrême droite ? » invite Mathieu Souquière dans Casser la vague (L'Aube). Mark Fortier expose, de manière ironique, sa « thérapie de conversion » pour Devenir fasciste (Lux).
Statue de la République le 22 février 2025.- Photo HANS LUCAS VIA AFP - XOSE BOUZASPour télécharger ce document, vous devez d'abord acheter l'article correspondant.
Patrick Cohen met en garde contre La tentation de la résignation (Flammarion) face à « l'onde de choc du RN ». Julien Talpin coordonne Nouveau peuple, nouvelle gauche ! (Amsterdam) où 15 contributions mettent à l'épreuve la relation des classes populaires avec la gauche. L'auteur rédige également avec Antonio Delfini L'État contre les associations : anatomie d'un tournant autoritaire (Textuel). Lumir Lapray dresse le portrait politique d'une France périurbaine et rurale « qui ne se retrouve nulle part » dans Et nous ? (Payot). Alice Coffin et Fatima Ouassak exposent des hypothèses « pour vaincre l'extrême droite » en renforçant Le camp du bien (Les Liens qui libèrent).
Soubresauts de l'actualité internationale
Les soubresauts de l'actualité internationale alimentent aussi plusieurs titres. Français, Européens, réveillons-nous ! (Tallandier) interpelle l'ancien maire de Bordeaux Alain Juppé pour faire face aux mutations de la scène mondiale. Roland Cayrol analyse la géopolitique des États-Unis et la Russie et appelle les Européens à défendre l'État de droit dans Avenir de la démocratie (L'Aube). Arthur Kenigsberg présente les enjeux liés aux territoires de l'ancien bloc soviétique dans L'Europe de l'Est n'existe pas : ces pays oubliés où se joue notre avenir (Eyrolles) tandis que Michaël Levystone analyse la Géopolitique de l'Eurasie (Le Cavalier bleu).
Alors que Volodymyr Zelensky tente d'obtenir « un cessez-le-feu complet et inconditionnel » au moment où nous rédigeons ces lignes, quelques ouvrages documentent encore la guerre menée par la Russie contre l'Ukraine. Anastasia Fomitchova raconte son engagement dans la résistance ukrainienne dans Volia (Grasset). Envoyé spécial en Ukraine pour Ouest-France, Philippe Lobjois livre son journal de guerre, Sa majesté du carnage (Récamier). L'ancien ambassadeur de France à Moscou Pierre Lévy emmène lectrices et lecteurs Dans la Russie en guerre (Tallandier).
En dehors de l'Europe, Benoît Chervalier estime que le continent africain est à un tournant de son histoire dans Ce qu'attend l'Afrique. Ressources locales, tensions mondiales (L'Aube) et Hakim El Karoui dessine « les traits d'une utopie concrète » dans Israël-Palestine, une idée de paix (L'Observatoire). Enfin, alors que les conflits mondiaux perdurent, Jan van Aken montre Comment faire taire les armes, et négocier la paix (Actes Sud) à travers de nombreux exemples concrets.
Panser l'école
Révolution aussi terrifiante qu'intrigante, l'intelligence artificielle fait l'objet de débats. Dans Le désert de nous-mêmes (L'Échappée), Éric Sadin analyse les caractéristiques des IA génératives et la rupture anthropologique à l'œuvre. Avec Un taylorisme augmenté (Amsterdam), Juan Sebastian Carbonell procède à une critique de l'intelligence artificielle en la mettant en regard avec la logique tayloriste. Marion Carré montre combien l'IA accélère, mais surtout homogénéise, notre productivité comme nos productions dans Le paradoxe du tapis roulant (Lattès). Anne Alombert estime qu'il ne faut pas opposer machines et humains, mais au contraire mettre les IA au service de l'intelligence collective dans De la bêtise artificielle (Allia).
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