Présenté hors compétition au Festival de Cannes en mai dernier, le film débute avec un attentat terroriste à Berlin en 1921: Talaat Pachat, considéré comme le principal responsable du génocide des Arméniens, est exécuté par Soghomon Thelirian, dont toute la famille avait été exterminée. Il s'ensuit le premier procès où est évoqué le génocide: le jury populaire acquitte l'activiste. Le film se transpose alors soixante ans plus tard, quand un autre acte terroriste tue l'ambassadeur de Turquie à Paris. Une famille se retrouve au cœur des événements et de leurs conséquences, partagée entre le désir de prendre les armes, l'envie de s'intégrer complètement et le besoin de pardonner.
L'auteur de La Bombe, José Antinio Gurriaran, journaliste et écrivain espagnol, a défendu tout au long de sa carrière la cause des Arméniens et leur lutte pour la reconnaissance du génocide dont ils ont été victimes en 1915. Le récit passionnant, écrit sous la forme d'un journal, prend place le 29 décembre 1980 quand l'Armée secrète de libération de l'Arménie (Asala) fait exploser les locaux de deux compagnies aériennes à Madrid. José Antonio Gurriaran passait par là et se retrouve à moitié mort. De là, il va chercher à comprendre la motivation de ceux qui ont failli le tuer.
Robert Guédiguian a transposé l'histoire à Paris et, au lieu de mettre en scène le journaliste, il a préféré un jeune cycliste. Celui-ci va suivre le même chemin: vouloir rencontrer les auteurs de l'attentat qui l'a laissé paralysé de longs mois. Le cinéaste a eu l'idée d'adapter le livre après avoir rencontré son auteur. Il y a surtout trouvé toutes les thématiques qui lui sont chères: les racines, l'Arménie, le pacifisme, le pardon et la famille. Il ne nie pas la dimension engagée de son film, plaidant pour la reconnaissance du génocide. "Les génocides relèvent de la folie. On trouve toujours des raisons objectives ou pseudo-objectives, mais ça reste des folies absolues, avec de folles conséquences", explique le réalisateur pour rappeler la nécessité de filmer ce pan de l'Histoire.
José Antonio Gurriarian a écrit aussi écrit Armenios, el genocidio olvidado (Espasa, 2008), sur le génocide des Arméniens, El rey en Estoril, sur l'exil du roi Juan Carlos au Portugal, Goya: Pasion y muerte, biographie du célèbre peintre et récemment As Mulleres do Monte, enquête sur l'après-guerre en Gallicie, entre tortures par le régime franquiste et résistants qui prenaient le maquis.