Le nombre de primo-romanciers atteint, dans cette cuvée 2022 un niveau record de 90 (+ 21 %). Au cours de la dernière décennie, il n'a été dépassé qu'une fois, en 2018 (94 premiers romans). Mais l'audace relève cette année plus des petites maisons d'édition que des grandes. Gallimard a resserré le nombre de ses premiers romans à quatre. Flammarion, Grasset et Robert Laffont n'en proposent qu'un seul et Albin Michel aucun. Seul Plon lance cinq titres à la rentrée, dont un dans sa collection -« tribune libre ».
90 titres chez 74 éditeurs
Dès lors, au total, 74 éditeurs, souvent de petite taille, défendent des primo-écrivains, contre 52 un an plus tôt. C'est le cas d'Hors d'Atteinte avec Des rêves d'or et d'acier, d'Émilie Tôn, et Laisse tomber la nuit, d'Agnès Mascarou, des éditions du Rocher (Jouer, trahir, crever, de Frédéric Massot, et Nous en resterons là, de Chloé Lambert) ou encore de Verdier (Jean-Luc et Jean-Claude, de Laurence Potte-Bonneville, et Une mère éphémère, d'Emma Marsantes) qui défendent deux primo-romanciers chacune.
2022 voit aussi l'irruption de deux nouvelles maisons qui proposeront chacune un primo-romancier. Le présentateur et journaliste Mouloud Achour dont la maison a été baptisée aux couleurs de son émission, Clique, défendra La guerre des bouffons, d'Idir Hocini, et la très jeune maison spécialisée en primo romancières, Livres Agités, présentera la première fiction de Mona Messine (Biche). Gallimard profite également de la rentrée pour lancer sa marque Scribes, dirigée par Clément Ribes, avec notamment un premier roman : Au moins nous aurons vu la nuit, d'Alexandre Valassidis.
Une large majorité d'autrices
À l'image des années précédentes, une majorité des premiers romans de la rentrée (65 %) sont signés par des femmes. De même, les professions dominantes restent stables avec une majorité d'enseignants (Luc Vezin,La vie sans histoire de James Castle, Arléa), de journalistes (Samar Seraqui De Buttafoco,Vivre sans bruit, Charleston) et de professionnels de l'édition (Guillaume Perilhou, Ils vont tuer vos fils, L'Observatoire). Parmi les profils, quelques originalités se sont tout de même glissées. Anne Carrière publie le texte de P.E Cayral, un vendeur de chapeaux parcourant l'Europe (Au départ, nous étions quatre) et Bourgois défend le roman de Guillaume Lebrun, un éleveur d'insectes basé dans le sud de la France (Fantaisies guérillères). On retrouve aussi Matthieu Seel, alias « Charles » dans le podcast d'Arte Radio Crackopolis (Rien ne dure vraiment longtemps, Harper Collins).
Cette année, la transmission est au cœur des récits. Questionnements autour de la virilité (Un fils, Angelo Arancio, Tohu-Bohu), grande plongée dans les origines (Ajar-Paris, Fanta Dramé, Plon), mémoire d'un père disparu (Petite, je disais que je voulais me marier avec toi, Mehtap Teke, Vivianne Hamy) ou souvenirs mystérieux de ce dernier (L'insoupçonnable héritage de monsieur Meyer, Ariel Sibony, Ramsay), chaque texte a pour point d'ancrage le décès d'un proche, comme un électrochoc qui parcourt les primo-romanciers de cette rentrée. P. G.
Trois meilleurs titres
Faite de cyprine de punaises, Lauren Delphe, Ixe
Les filles bleues de l'été, Mikella Nicol, Le nouvel Attila
Laisse tomber la nuit, Agnès Mascarou, Hors d'atteinte
Trois meilleures premières phrases
« Je suis née sur la départementale 91, quelque part entre Auchan et Ikéa. » Nicolas Garma-Berman, La fille aux plumes de poussière, Belfond
« Une enfant seule s'en va sur l'allée aux ronces. » Clara Benador, Les petites amoureuses, Gallimard
« J'ai choisi mon studio parisien en rêveur inconscient et y vis désormais comme un détenu qui se cogne aux murs. » Franck Saffioti, 21 Lutetia, Réalgar