Le sujet est encore très nouveau en France, mais il devrait rapidement prendre de l’importance : comment mettre à disposition les données brutes produites au cours des recherches scientifiques ? Ces données, de plus en plus souvent sous forme numérique, sont indispensables à la validation des résultats. Elles constituent également un réservoir d’informations précieux pour toute la communauté des chercheurs. Spécialistes de l’information scientifique et technique, les bibliothèques de l’enseignement supérieur ont leur rôle à jouer dans ce nouveau défi. Les différentes expériences françaises et étrangères présentées lors du 43e congrès de l’Association des directeurs et personnels de direction des bibliothèques universitaires et de la documentation (ADBU), rassemblé au Havre du 18 au 20 septembre, a permis aux quelque 250 congressistes de se faire une idée plus précise de la question, même si elle est encore loin des préoccupations quotidiennes des professionnels. « On a déjà du mal à organiser des archives ouvertes pour les publications de la recherche. Alors, pour les données brutes… », relevait un participant.
La Commission européenne en fait en tout cas une question prioritaire. Elle a doté son plan pour la recherche et l’innovation 2014-2020 (baptisé Horizon 2020) de 70,2 millions d’euros, et vient de lancer un programme pilote pour élargir aux données de la recherche les réservoirs en open access prévus pour les publications. En France, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) s’est également saisi du sujet. Au cours du congrès, Michel Marian, adjoint au chef du service de la coordination stratégique et des territoires du MESR, a annoncé officiellement la création de BSN 10, une nouvelle section qui sera chargée de la question des données de la recherche au sein du programme national « Bibliothèque scientifique numérique ». Contrairement au choix fait par la Belgique et l’Italie, la France ne prévoit pas de rendre le dépôt des données obligatoire. «On s’oriente vers l’obligation pour les sciences dures, mais par pour les sciences humaines», a nuancé Michel Marian.
La convergence des métiers
En France, même si on est encore loin de l’expérience de la Grande-Bretagne dont l’exposé a impressionné les auditeurs au Havre - un organisme coordonne toutes les actions au niveau national et fournit les outils de formation pour les bibliothécaires -, quelques initiatives ont déjà vu le jour, comme celle de l’Institut national de la recherche agronomique. Depuis avril 2013, l’Inra a mis sur pied une politique de partage des données élaborée par le travail conjoint des chercheurs, des informaticiens et des professionnels de l’information scientifique et technique. Ces derniers ont notamment apporté leurs compétences «juridiques, technologiques et dans le traitement des données», a souligné Odile Hologne de l’Inra, lors de sa présentation.
Véronique Heurtematte