"Automates de prêt, musique libre, bibliothèque hors les murs. Aujourd'hui, on sait tous comment le numérique transforme la profession, par contre on ne sait pas forcément comment les appréhender, souligne le responsable du développement numérique. Parce que le numérique est, ni plus ni moins, qu'une nouvelle façon de partager", et que "les bibliothécaires sont plus souvent en réunion qu'en train d'échanger avec les usagers", Lionel Dujol a eu l'idée de mettre les bibliothécaires en "situation participative".
"Vous avez des post-it et un tableau avec trois colonnes: "menace?", "opportunité?", "conditions de réussite" et l'idée est que chaque groupe me rapporte une vision commune de l'un de ces piliers du numérique". Le chrono est lancé, armé de leurs papiers de couleur, les participants griffonnent. "On n'est pas habitués à réfléchir sur comment on voit l'innovation, et de réfléchir à notre définition personnelle des choses", se réjouit-on en petit comité dans le groupe "mobilité". Les tableaux se colorent d'enthousiasme: "connaissances pour tous", "imagination", "plus d'échanges" mais aussi d'inquiétudes: "amateurisme", "démagogie", "fin de notre profession".
Synthèse
Puis, vient le moment de la synthèse, et l'exercice devient plus aride. Commentés, les mots suscitent le débat et les désaccords, l'anxiété monte : "Attention, il ne nous reste plus beaucoup de temps !", l'agacement se fait sentir : "Ça ne sert à rien ce que vous faites là !" lance une bibliothécaire à sa collègue qui entame, méthodique, la lecture à voix haute des dizaines de post-its accrochés.
"C'est ça le participatif, et avec l'essor du numérique en bibliothèque, il va falloir de plus en plus apprendre à s'adapter à l'autre", sourit Lionel, qui passe d'un atelier un autre, davantage comme observateur que prescripteur. "J'ai entendu plusieurs participants parler d'anarchie, c'est ça le collaboratif, on tâtonne", rigole-t-il.
Vient l'heure de restituer aux autres groupes sa mise en commun. Les synthèses se répondent, dialoguent entre elles. À la peur de devenir inutile, on propose une nouvelle vision du métier, "gardien de la qualité de la qualité des contenus"; face à l'angoisse de la déshumanisation du lieu, certains rétorquent "qu'un lieu physique sera toujours nécessaire, même si on ne propose que des contenus dématérialisés".
Les ateliers sont l'occasion de mettre en pratique ce que les congressistes ont entendu, intégré depuis le début du congrès. Mais pour Lionel Dujol, cela va plus loin qu'une restitution de connaissances. "Ils ont vu combien le participatif était quelque chose de difficile à mettre en place pour qu'il fonctionne bien, mais que lorsqu'on y arrive c'est un outil essentiel pour jouer encore mieux son rôle : ouvrir l'accès au savoir!" conclut Lionel.