Le fisc français réclame 198 millions d'euros à Amazon

Ministère des Finances à Paris

Le fisc français réclame 198 millions d'euros à Amazon

Le groupe américain, qui conteste le redressement concernant les années 2006 à 2010, assure qu'il utilisera tous les moyens possibles pour le faire annuler.

Par Hervé Hugueny
avec hh Créé le 15.04.2015 à 20h04

C'était en petits caractères passés inaperçus au milieu des 40 pages du dernier rapport sur les résultats trimestriels d'Amazon, publiés le 25 octobre: «en septembre 2012, nous avons reçu un avis de redressement fiscal pour les années 2006 à 2010, concernant l'affectation de chiffre d'affaires entre différents pays. L'avis propose un redressement d'environ 252 millions de dollars (198,4 millions d'euros), intérêts et pénalités de retard compris» explique le site de vente en ligne à ses actionnaires (voir à ce lien).

L'enquête durait au moins depuis quatre ans, mais elle était jusqu'alors mentionnée sans détail: dans sa notice de résultats de 2008, le cybermarchand avait juste dû reconnaître qu'il était sous le coup d'une investigation des services fiscaux français (LH 673 du 6 février 2009), mais également allemand, luxembourgeois, et britannique. C'est d'ailleurs au cours d'une audition devant la Chambre des communes qu'Andrew Cecil, le lobbyiste d'Amazon, cuisiné par les députés britanniques a lâché que l'administration fiscale française avait précisé sa demande (enregistrement à ce lien).

L'avis n'est pas définitif indique Amazon qui souligne: «nous ne sommes pas d'accord avec cette estimation, et nous avons l'intention de la contester fermement. Nous prévoyons d'utiliser tous les recours administratifs possibles, et si ce n'est pas suffisant pour résoudre ce différend, nous prévoyons de porter l'affaire en justice». Pour montrer que rien n'est perdu, le site ajoute que les Etats-Unis et le Japon avaient aussi exigé des redressements pour des prestations transfrontalières concernant les exercices 2006 à 2012, et qu'après négociation le différend s'est terminé par une transaction dont le montant «n'était pas significatif».

Les profits sont en quasi totalité engrangés au Luxembourg

Les filiales françaises d'Amazon sont présentées comme de simples sociétés de services, réalisant des prestations facturées à Amazon Eu Sarl, une des nombreuses sociétés du groupe américain basées au Luxembourg, et qui encaisse toutes les transactions réalisées en Europe. Le système d'évasion fiscale consiste à sous-valoriser ces prestations des filiales françaises, pour qu'elles déclarent un chiffre d'affaires et un bénéfice minimum.

Les profits sont en quasi totalité engrangés au Luxembourg, d'où ils sont évaporés vers une autre filiale enregistrée à Gibraltar (voir LH 908 du 4 mai 2012: «Payer des impôts? Et quoi encore?»). Les parlementaires français se sont également émus de cette perte de ressources pour le budget national, alors qu'Amazon reçoit par ailleurs l'aide des pouvoirs publics, notamment pour sa dernière implantation en Bourgogne.

La commission sénatoriale qui a enquêté sur ce système, également mis en oeuvre par Apple et Google, avait ainsi voulu entendre Xavier Garambois, l'ancien responsable d'Amazon France. Malheureusement, celui-ci avait dû se désister au dernier moment.

Outre celles qui sont citées ci-dessus, Amazon fait l'objet d'enquêtes fiscales en Chine, et aux Etats-Unis, de la part du gouvernement fédéral et de plusieurs Etats américains.
15.04 2015

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