Les propos tenus par le président de la République au Forum d'Avignon le 18 novembre ne laissent guère d'espoir de voir le livre échapper au relèvement de TVA prévu dans le projet de loi de finances rectificative présenté le 7 novembre. Dans ce contexte, l'interprofession, libraires en tête, s'efforce de trouver des aménagements qui permettront au moins de tenir compte des spécificités du secteur et d'adapter en conséquence la hausse de TVA de 5,5 % à 7 % dès le 1er janvier. "A défaut d'obtenir une exemption, il faut au moins obtenir des délais, insiste Guillaume Husson, délégué général du Syndicat de la librairie française (SLF) qui réclame un report de trois mois, ce qui amènerait à une application au 1er avril juste après la clôture des comptes de nombreuses librairies. "De toute façon, assure le délégué général, une application au 1er janvier est techniquement impossible compte tenu à la fois de l'importance du nombre de références existantes et des stocks présents en librairie.»
Plus de 500 millions de volumes
Selon le SNE, ce sont 500 millions de volumes en stock qui sont concernés. Les libraires souhaitent aussi obtenir de la direction de la concurrence la possibilité de facturer les nouveaux prix même s'ils diffèrent de ceux imprimés ou étiquetés sur les livres. Le SLF préconise d'organiser une communication nationale relayée en librairie pour informer et expliquer aux clients que, pour les livres déjà parus, le prix à payer pourra différer de celui indiqué. Un soutien spécifique pourrait être financé par le Centre national du livre pour les librairies indépendantes.
Guillaume Husson se félicite par ailleurs de l'engagement déjà pris par de nombreux éditeurs de répercuter en totalité la hausse de TVA sur leurs prix de vente. Parmi les indépendants ayant décidé de relever les prix de l'ensemble de leur catalogue, citons Minuit, Liana Levi ou encore L'Ecoles de loisirs, ce dernier précisant même que le nouveau prix public TTC sera arrondi à la dizaine de centimes supérieure.
Rassembler les données
Dilicom, en première ligne pour la collecte des prix auprès des distributeurs-diffuseurs, se donne jusqu'au 19 décembre pour réunir les tarifs des 630 000 références actives (selon la base Electre), avant d'en faire un fichier propre et homogène. Les distributeurs doivent eux-mêmes obtenir ces données des éditeurs. Dans les groupes, le principe serait de fixer une date butoir vers la mi-décembre et de considérer que les éditeurs n'ayant pas répondu acceptent tacitement la hausse uniforme de la TVA sur leurs prix, indique-t-on au SNE. "La plupart des éditeurs vont répercuter la hausse, mais il reste le problème des collections à prix uniques et des prix marketing", note Vincent Marty, directeur général de Dilicom. Pour le calendrier de transmission des données, l'arbitrage passe entre la nécessité de laisser assez de temps pour obtenir une base de tarification aussi complète que possible, et l'impératif de donner aux société de services en ingénierie informatique (SSII) les délais suffisants pour entrer ces nouveaux prix dans les systèmes de gestion des librairies. "Nous avons programmé une mise à disposition des données le 29 décembre, dans tous les formats", prévoit Vincent Marty. Mais il sera impossible aux SSII de mettre à jour toutes les librairies pour le 1er janvier, notamment celles qui ne fonctionnent pas en télémaintenance. Le délai d'application se révèle donc indispensable, estime le directeur général de la plateforme de transmission de commandes. La commission des usages commerciaux devra en discuter ce vendredi 25 novembre.
Nomination d'un médiateur
Afin de calmer le jeu, Valérie Pécresse, ministre du Budget, et Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture, ont nommé le 17 novembre un médiateur. Pierre-François Racine (voir p. 47), conseiller d'Etat, chargé d'accompagner le secteur dans sa transition, a déjà rencontré le SLF et devait voir cette semaine la Société des gens de lettre, avant de s'entretenir avec le SNE. A l'Assemblée nationale, le groupe socialiste a décidé le 23 novembre de déposer des amendements contre cette hausse. Ils seront portés par les députés de la commission des finances. Les sénateurs disposent d'un peu plus de temps.