James Daunt (Waterstone et Barnes & Noble): « Le prix unique n'est pas le seul garde-fou possible »
Le patron des deux plus grandes chaînes de librairies au Royaume-Uni (Waterstones) et aux Etats-Unis (Barnes & Noble) analyse la politique du prix unique du livre dans le contexte économique actuel, préférant la flexibilité des prix et la fiscalité à imposer à des géants comme Amazon. De fait, en Europe, la politique du prix unique ne s'est pas imposée comme modèle et n'est appliquée que dans quatre pays.
Par
Isabel Contreras Créé le
22.04.2021
à 13h26, Mis à jour le 03.02.2025 à 09h36
Au Royaume-Uni, les enseignes comme la vôtre réclament une baisse des impôts locaux afin de préserver la filière. Pourquoi ne réclamez-vous pas également un contrôle sur le prix de vente ?
Au Royaume-Uni, la situation est littéralement dingue. Nous payons des impôts et des loyers délirants alors qu'Amazon n'est même pas taxé car il commerce en ligne. Je trouve cela démentiel. En parallèle, nous n'avons aucune mesure de protection qui vienne encadrer l'industrie du livre. Par conséquent, l'édition se comporte comme la pêche intensive. Les éditeurs ne se soucient pas de l'environnement, leur seul but étant d'attraper le plus de poissons possibles. Beaucoup d'éditeurs britanniques vendent des livres aux supermarchés, à Amazon, et pratiquent des remises sur les prix de toutes les manières possibles et imaginables... Il faudrait déjà commencer par taxer Amazon ! Cela protégerait la librairie indépendante.
Et le prix unique ?
Je ne sais pas quel est le meilleur modèle. Est-ce que le prix unique du livre contribue à préserver l'écosystème du livre ?
Oui, mais ce n'est pas le seul garde-fou possible. Je pense qu'il faudrait appliquer une certaine flexibilité au système pour le rendre plus dynamique. Vue de l'extérieur, la France dispose d'un réseau magnifique de librairies indépendantes tandis que ses enseignes ont l'air de moins bien se porter.
Vous n'avez pas un environnement qui permette la création de grandes librairies de 10000 m2. Est-ce une mauvaise chose ? Pour ma part, je trouve cela dommage.
Photo LIVRES HEBDO
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Mais quel est votre modèle parfait ?
Mon but, c'est de vendre le plus grand nombre de livres. Je sais que les enseignes conservent une mauvaise réputation mais elles ne sont pas toujours mauvaises. L'Italie est un bon exemple de modèle vertueux à ce propos.
Le groupe Feltrinelli a installé des librairies dans des endroits stratégiques que les libraires indépendants n'auraient jamais pu s'offrir tellement les loyers sont chers et la prise de risque importante. C'est là où les chaînes interviennent, leurs épaules sont plus solides. Dans un grand pays comme la France, vous avez de nombreuses et merveilleuses librairies indépendantes, comme c'est le cas de Mollat à Bordeaux, mais aucune grande librairie telle Foyles à Londres ou Feltrinelli à Milan.
Mais qu'en est-il de la diversité éditoriale quand les chaînes et les supermarchés absorbent la librairie indépendante ?
J'ai l'esprit d'un libraire indépendant. J'ai d'ailleurs fondé la petite chaîne de librairies qui porte mon nom à Londres avant d'arriver à la tête de Waterstone. À cette époque, l'enseigne se portait mal financièrement. Surtout, l'offre était dégueulasse, que des best-sellers et aucune logique dans la gestion des stocks. Nous avons rendu cela intelligent en défendant ce message : nous aimons les livres et les libraires. Et nous avons dit aux librairies qui étaient sur place, si vous ne croyez pas en votre travail, si vous n'aimez pas lire, partez.
Si les livres vous intéressent, restez. Le but c'est de rendre chaque enseigne intéressante aux yeux de sa clientèle locale. Si l'enseigne est bien équipée, alors elle ne pourra que mieux fonctionner.
Vous aurez toujours besoin de vendre des James Patterson et des Chroniques de Bridgerton pour faire rentrer une personne en librairie. Le plus important c'est qu'elle rentre, ensuite le libraire et son pouvoir de prescription feront le reste.
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