La réunion programmée le matin était organisée autour de trois tables-rondes, dont deux animées par des journalistes des magazines professionnels américain et français, Publishers Weekly et Livres Hebdo. Elle s'est prolongée l'après-midi par des rencontres bilatérales dans lesquelles étaient représentés, côté français, Média Participations (Dargaud, Dupuis, Le Lombard), Casterman, Delcourt, Glénat, Futuropolis, Gallimard BD, Sarbacane et Rue de Sèvres.
Sophie Castille (Média Participations) et Etienne Bonnin (Glénat) se sont d'abord attachés à présenter le marché de la BD en France. Pour sa part, l'ancien P-DG de DC Comics, Paul Levitz (Boom Studios !), a souligné le faible poids économique du secteur aux Etats-Unis (0,9 million de dollars de chiffres d'affaires, contre 27,4 pour l'ensemble de l'édition). Et de rappeler que, parmi les publications européennes, seul Persépolis, de Marjane Satrapi, a figuré dans le Top 20 des meilleures ventes du secteur, avec 54 000 exemplaires. "Le premier Tintin s'est vendu à 3500 exemplaires", a-t-il rappelé, martelant que "la bande dessinée européenne n'a pas de poids significatif sur le marché américain".
Karen Green (Columbia University) s'est étonnée de son côté de ce que certains titres d'Astérix n'aient même pas d'éditeur américain alors que le taux de circulation de leur édition britannique en bibliothèque est très important. "La BD américaine est encore largement associée aux super-héros, aux blockbusters et à la jeunesse", a-t-elle également déploré, avant de faire valoir les opportunités qui se présentaient aux éditeurs français.
Dans la deuxième table-ronde, dans laquelle Mark Siegel (First Second) a retracé la trajectoire de sa maison de romans graphiques, Adam Lerner (Lerner Publishing) a rendu hommage à la qualité artistique de la bande dessinée française: "de formidables histoires et une épatante virtuosité artistique". Terry Nantier (NBM) a pointé le rôle de la génération de L'Association, avec Joann Sfar ou Christophe Blain, pour relancer l'intérêt du public pour le roman graphique français.
La troisième table-ronde a permis, elle, de comparer les approches de la BD numérique aux Etats-Unis et en France, avec David Steinberger, le fondateur de la plateforme de BD numérique ComiXology, aujourd'hui filiale d'Amazon, et le directeur général de Média Participations, Claude de Saint-Vincent, à l'initiative de la plateforme numérique collective des éditeurs de bande dessinée français, Izneo.
"Izneo propose plus de 12 000 titres numériques en français, mais aussi en anglais et en néerlandais", a expliqué Claude de Saint-Vincent. De son côté, David Steinberger a insisté sur les réserves de croissance du secteur, que le numérique peut contribuer à développer. Les achats de BD par an et par personne représentent 17,01 $ au Japon, 8,66 $ en France et seulement 0,36 $ aux Etats-Unis, a-t-il constaté, se réjouissant de ce que le marché de la BD dans son pays ait progressé de 300 millions à 870 millions de dollars entre 1997 et aujourd'hui.