Le 13 février, Voyage au pays des bibliothèques d'Erik Orsenna et Noël Corbin sera publié chez Stock, augmenté de deux textes où les auteurs expliquent l'importance de la lecture dans leur parcours personnel et dressent un premier bilan du plan national d'extension des horaires.
Livres Hebdo : un an après sa -parution, pourquoi publier ce -rapport chez un éditeur ?
Erik Orsenna : Ayant été longtemps fonctionnaire de l'Etat, j'ai toujours trouvé dommage que les rapports ne soient pas plus connus, et pas plus appliqués. Publier celui-ci est une manière de dire : « s'il vous plaît, n'enterrez pas ce rapport ». Je précise que le montant des ventes sera entièrement reversé à une association de bibliothécaires, nous n'avons pas encore décidé laquelle. C'est aussi parce que, au-delà d'un rapport, c'est un voyage dans les profondeurs du pays. Je note que dans le débat national actuel, il n'y a aucune référence à la culture. Or, la culture, c'est le Possible, avec une majuscule !
Quel bilan tirez-vous de son -impact ?
E.O. : 231 dossiers ont été déposés, pour une augmentation horaire de huit heures hebdomadaires en moyenne, ce n'est pas rien. 60 % des projets viennent de villes de moins de 10 000 habitants. Cela montre que les bibliothèques sont des clés essentielles dans la politique de rééquilibrage des territoires, qui est mon obsession. Par son rôle culturel et aussi social, car je ne fais pas de différence entre les deux, avoir une bibliothèque, c'est accroître l'égalité des chances plutôt que de reproduire à l'identique des générations d'élite.
Avez-vous l'impression que la vision des maires sur les bibliothèques a évolué ?
E.O. : Oui, ils ont compris le rôle qu'elles pouvaient jouer pour tisser de liens forts avec la population, dans leurs locaux et hors les murs, dans les hôpitaux, les prisons. Et il y a une vraie demande des habitants. Une fois qu'elle s'est exprimée, on ne peut plus revenir en arrière. Les maires auront du mal à réduire à nouveau les horaires.
Pourtant, des communes doivent réduire leur service de lecture publique, faute de moyens. N'est-ce pas inquiétant ?
E.O. : Si, bien sûr. Et c'est bien la question que j'avais soulevée l'année dernière auprès du président de la République. Des moyens ont été donnés et l'actuel ministre de la Culture a indiqué clairement sa volonté de poursuivre cette politique. Cependant, l'essentiel du budget du ministère est capté par les grandes institutions parisiennes, par ailleurs formidables, mais il n'y a pas que Paris en France ! Il faut réfléchir à la répartition des moyens attribués à la culture.