Amour de marbre. « Amor di marmo », c'est ainsi que les Italiens ont sous-titré l'exposition des chefs-d'œuvre de la statuaire romaine de la collection Torlonia. Montrée pour la première fois aux musées du Capitole à Rome en 2020, elle fut saluée comme un véritable événement. Conservée depuis des siècles dans le palais de la famille princière Torlonia, Piazza Venezia, la plus grande collection privée au monde de sculptures antiques n'était plus accessible au public depuis les années 1950. Un accord avait fini par être trouvé entre la famille, représentée par le prince Alessandro (1925-2017) et les autorités italiennes. Aujourd'hui, dans une version renouvelée et augmentée, ce sont quatre-vingt-dix œuvres majeures, des marbres surtout, mais aussi quelques bronzes exceptionnels, qui font le voyage jusqu'à Paris, afin de se mêler à leurs semblables, joyaux des collections du Louvre, lesquels ont été acquis essentiellement auprès d'aristocrates italiens, les Borghese notamment. Juste retour des choses, et clin d'œil de l'histoire. En effet, les prestigieux Torlonia, princes, marquis et comtes, descendent d'un modeste Français, un Auvergnat, Marin Tourlonias (1725-1785), venu chercher fortune à Rome. Après avoir été valet de cardinal, il est devenu marchand de tissus, établi Piazza di Spagna, et a fait fortune. Ses descendants ont abandonné le commerce pour la banque, et, comme les Médicis avant eux, se sont alliés aux plus grandes familles, ont acquis palais, domaines et titres.
Pour la première fois hors d'Italie, on va donc voir (du 26 juin au 11 novembre) une impressionnante série de bustes impériaux (comme au musée national de Naples) en parfait état de conservation. Saisissants de vie, tels ceux des Syriennes Julia Domna et Julia Maesa, de la famille des Sévères. Ou encore ces vieillards parfaitement réalistes, rompant avec l'idéalisation du corps chez les artistes grecs. Mais aussi tous ces jeunes hommes, comme ce Germanicus en bronze de type héroïque, magnifiant le corps masculin nu, alors que les femmes, à l'exception de quelques déesses (Aphrodite, bien sûr), sont en général représentées vêtues de robes ou de voiles. On appréciera également des bas-reliefs, l'une des spécialités romaines héritées de l'art hellénistique, surtout ceux sur les sarcophages, montrant souvent des scènes de combat criantes de vérité. Un grand nombre proviennent de fouilles archéologiques menées au XIXe siècle par les Torlonia, mécènes, sauveteurs, restaurateurs, collectionneurs. Merci, Martin.
Chefs-d'œuvre de la collection Torlonia
Seuil
Tirage: 3 700 ex.
Prix: 45 € ; 352 p.
ISBN: 9782021562835