Avant-critique Histoire

Claude Grimmer Fontange, "Les princesses de Clèves" (Fayard)

Claude Grimmer Fontange - Photo © Marc Génin

Claude Grimmer Fontange, "Les princesses de Clèves" (Fayard)

L'historienne Claude Grimmer Fontange raconte l'histoire de la « vraie » princesse de Clèves, en réalité composite de trois sœurs.

Parution 9 avril

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Par Jean-Claude Perrier
Créé le 06.04.2025 à 11h00

Toutes pour une. Tout le monde connaît La princesse de Clèves, le long-seller attribué à Marie-Madeleine Pioche de La Vergne, comtesse de La Fayette, paru anonymement en 1678 et qui eut un immense succès. Le roman a vécu une fortune littéraire inouïe jusqu'à nos jours, ainsi que le rappelle l'historienne Claude Grimmer Fontange dans son brillant essai.Cependant, la princesse de Madame de La Fayette, au destin reconstitué des décennies après sa mort, n'a jamais existé. En réalité, elles étaient trois. Trois sœurs, les filles de François de Clèves, duc de Nevers, et de la duchesse Marguerite, née Bourbon-Vendôme. Des familles apparentées à la plus haute noblesse de France, avec laquelle elles renforcèrent les liens par leurs mariages : Henriette (1542-1601), l'aînée, épousa, grâce à Catherine de Médicis, Ludovic de Gonzague, prince italien de Mantoue ; sa cadette, Catherine (1548-1633), se maria d'abord avec un prince protestant, Antoine de Croÿ, puis, devenue veuve, avec le duc Henri de Guise, dit « le Balafré », chef fanatique du parti catholique ; la dernière, enfin, Marie (1553-1574), fut donnée à Henri de Bourbon-Condé, protestant également, parent de Jeanne d'Albret, reine de Navarre, la mère du futur Henri IV.

Tout cela peut paraître complexe, mais des tableaux généalogiques, en début de volume, fixent les idées du lecteur. Et ces renseignements sont fondamentaux pour comprendre le rôle que ces princesses, intelligentes, cultivées, énergiques, engagées, ont joué dans l'histoire. D'abord, en tant qu'héritières d'immenses domaines, à la mort de leurs parents, puis de leurs deux frères, François II (en 1562), et Jacques (en 1564). C'est en principe Henriette qui devenait le chef de famille, mais ses deux cadettes lui contestèrent nombre de possessions. D'autant que les séparaient aussi leurs convictions religieuses : Marie était farouchement protestante, Catherine redevenue catholique, et Henriette plutôt réformée, mais mariée à un Italien fervent catholique. En pleines guerres de Religion, la position stratégique des Clèves n'était pas simple, et les déjeuners familiaux devaient être agités !

Ce sont ces trois femmes d'exception, méconnues alors que leur composite romanesque connaît une gloire durable et multimédia, que Claude Grimmer Fontange ressuscite et raconte dans ce livre impeccable, érudit et clair à la fois. On n'ose dire que leurs biographies croisées se lisent comme un roman de cape et d'épée à la Dumas (qui a bien sûr beaucoup écrit sur la Renaissance), mais ce n'en est pas loin.

Claude Grimmer Fontange
Les princesses de Clèves
Fayard
Tirage: 1 700 ex.
Prix: 24 € ; 320 p.
ISBN: 9782213722016

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