Le 1er octobre, l'Inspection générale des bibliothèques (IGB), créée en 1822, a disparu pour devenir, sous l'acronyme de BD2L (Bibliothèques, documentation, livre et lecture publique), l'un des cinq collèges thématiques de la toute nouvelle Inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR). Celle-ci, fruit de la fusion de l'IGB avec l'Inspection générale de l'Education nationale (Igen), l'Inspection générale de l'administration de l'Education nationale et de la recherche (IGAENR), et l'Inspection générale de la jeunesse et des sports (IGJS), rassemble 280 agents.
Livres Hebdo : Comment est née l'idée d'intégrer l'Inspection générale des bibliothèques à l'IGESR ?
Benoît Lecoq : Jean-Richard Cytermann, chargé en 2007 d'un rapport qui lui avait été commandé par les ministres de l'Education nationale et de l'Enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur la perspective d'un rapprochement entre l'Igen (éducation nationale) et l'IGAENR (administration de l'éducation nationale et de la recherche), a préconisé d'intégrer également l'IGJS (jeunesse et sport) et l'IGB. Quand on m'a fait cette proposition, et j'insiste sur le terme de proposition, j'ai rapidement pensé que ce pouvait être une opportunité historique pour l'Inspection générale des bibliothèques.
En quoi est-ce une opportunité ?
B. L. :D'abord, cela nous permet de réintégrer un grand corps, de l'ampleur des grandes inspections interministérielles telles que l'Inspection générale des finances, avec le statut d'inspecteur. Nous avions perdu ce statut en 1992 lors de la réforme créant le corps des conservateurs généraux des bibliothèques. Les inspecteurs généraux des bibliothèques avaient alors cessé de constituer un corps distinct pour devenir des conservateurs généraux chargés de missions d'inspection générale. Cela a temporairement un peu affaibli la position de l'IGB. Retrouver le statut d'inspecteurs nous donne une posture de surplomb et une légitimité professionnelle accrue. Cela ouvre des perspectives de carrière aux conservateurs et il faut y voir une marque de reconnaissance pour la profession tout entière.
La dimension transversale de cette nouvelle organisation est-elle positive ?
B. L. :Oui. La nouvelle organisation renforce des formes de transversalité qui existaient déjà de manière informelle entre les différentes inspections. Désormais, chaque inspecteur peut choisir d'appartenir en mode mineur, c'est-à-dire à hauteur de 20 % de son temps de travail, à un autre collège que le sien. Six inspecteurs d'autres collèges ont choisi en mineur le collège Bibliothèques, documentation, livre et lecture publique (BD2L). L'apport de professionnels venant d'autres horizons à nos études thématiques, comme prochainement la prise en compte des handicaps dans les bibliothèques universitaires et territoriales, ou encore le rôle des bibliothèques dans le développement de la science ouverte, sera extrêmement intéressant. En revanche, j'estime que les missions de contrôle dans les établissements doivent continuer à être réalisées par les inspecteurs de notre collège.
Le secteur des bibliothèques ne risque-t-il pas d'être noyé dans cette grande institution ?
B. L. : Non, car j'ai obtenu pour cette mutation des garanties essentielles. La première est de pouvoir continuer à travailler par délégation pour le ministère de la Culture comme c'était le cas auparavant : c'était absolument indispensable pour garder le même périmètre, sur les bibliothèques de l'enseignement supérieur et les bibliothèques territoriales. La seconde est de conserver notre identité au sein de cette vaste entité de 280 inspecteurs, où le collège des bibliothèques n'en compte que dix. Le décret précise qu'il ne peut pas y avoir moins de dix conservateurs en chef ou généraux des bibliothèques dans le collège BD2L. Cela prévient le risque de voir s'amenuiser au fil des ans le nombre de spécialistes des bibliothèques.
N'aurait-il pas été plus logique que l'IGB rejoigne l'Inspection des affaires culturelles ?
B. L. :La vocation statutaire de l'IGB a toujours été de prendre en compte, à parts égales, les services documentaires des universités et ceux des collectivités territoriales, voire des grands établissements culturels. Si elle avait dû rejoindre l'Inspection des affaires culturelles, l'IGB aurait inévitablement été coupée du monde de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, tandis qu'une Inspection de l'Éducation emporte avec elle la dimension culturelle.
Comment se feront les recrutements à l'IGESR ?
B.L. :Les appels à candidature se feront de manière profilée, notamment pour le collège Bibliothèques. Le choix sera fait par un comité de sélection présidé par un conseiller d'Etat, ce qui est une garantie d'indépendance. Il soumettra sa proposition au ministère de l'Enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Les nominations au collège Bibliothèques seront contresignées par le ministère de la Culture. Les recrutements seront ainsi plus transparents que précédemment où ils relevaient d'une forme de cooptation.
Quel aurait été l'inconvénient de ne pas rejoindre l'IGESR ?
B. L. :Qui ne voit que se tenir à l'écart de ce regroupement aurait conduit à un isolement délétère, voire, à terme, mortifère ? Notre intégration est à regarder comme un gage d'ouverture autant que de permanence. W