À Senlis, la librairie Saint-Pierre d’Amandine et Pascal Ardouin n’est pas au meilleur de sa forme. Les difficultés remontent à 2021, quelque temps après le Covid, quand les habitants « venus en masse durant la pandémie, ont repris la mauvaise habitude de commander leurs livres sur Internet », déplore Amandine Ardouin, jointe par Livres Hebdo. Car si le chiffre d’affaires de la librairie ne s’est pas effondré grâce aux ventes d'objets et à la papeterie, les ventes de livres, elles, ont chuté de 15%. Une baisse radicale qui empêche les époux Ardouin, seuls employés depuis 2017, de se verser un salaire depuis six mois.
Les grandes enseignes des environs éclipsent la librairie
« Les gens pensent que la librairie fonctionne car c’est un lieu dynamique avec de nombreux événements, alors pour eux ce n’est pas si grave d’aller dans une grande enseigne ». À moins de dix minutes en voiture se trouve un grand centre commercial abritant notamment la Fnac et Cultura, créant ainsi de la concurrence pour la librairie Saint-Pierre. Récemment, un magasin spécialisé dans les mangas a lui aussi ouvert ses portes, faisant également de l’ombre à la librairie généralist, chez qui ce même genre de livres représente 30% du chiffre d’affaires.
Un appel aux célébrités
Pour éviter de mettre la clé sous la porte, chose absolument « inenvisageable » pour la propriétaire, la librairie Saint-Pierre a donc décidé de lancer un appel sur les réseaux sociaux afin de mettre en place différents projets nécessaires à son regain d’attractivité. Dès le mois prochain, un auteur ou une autrice mettra, une journée par mois, son métier de côté et deviendra « libraire d’un jour ». Amandine Ardouin filmera ces rencontres.
En plus d’être une activité ludique et originale, ces temps d’échange permettront aussi et surtout de mettre en lumière un métier souvent idéalisé mais bien plus dur qu’il n’y paraît. La propriétaire a d’ailleurs déclaré vouloir créer « un événement joyeux, et fédérateur », « se battre tout en allant de l’avant ». Ce dispositif débutera dès le 12 octobre prochain avec Olivia de Lamberterie. Bien que les dates ne soient pas encore définies, la librairie Saint-Pierre devrait accueillir Elisa Tovati en novembre, Isabelle Carré en décembre et Mathias Malzieu en janvier.
« J’espère que cet engouement sera pérenne »
Cette campagne de communication semble déjà porter ses fruits, « depuis hier, les clients affluent dans la librairie, une espèce de cohésion s’est créée. C’est très émouvant », indique la propriétaire, qui mesure immédiatement son propos. « J’espère que cet engouement sera pérenne ». Car la librairie Saint-Pierre est loin d’être la seule à rencontrer ces problématiques.
Amandine Ardouin affirme avoir beaucoup d'amis libraires dans le même cas. « La différence, c’est qu’ils ne souhaitent pas parler de leurs difficultés car ils espèrent pouvoir revendre leur fonds. Mais si personne ne donne l’alerte, tout cela va passer sous les radars, nous devons éveiller les consciences ». Selon elle, « l’État doit prendre des mesures concernant le marché du livre d’occasion qui nécessite une législation ».