La réorganisation territoriale actuellement à l’œuvre dans toute la France est extrêmement importanteDavid-Georges Picard
"La réorganisation territoriale actuellement à l’œuvre dans toute la France est extrêmement importante, a expliqué en introduction David-Georges Picard, directeur de la bibliothèque Vaclav-Havel à Paris, ancien conseiller livre et lecture de la Direction régionale des affaires culturelles d’Ile-de-France, jusqu’en avril dernier, et coordinateur du livre Les bibliothèques dans les mutations territoriales, à paraître aux Editions du cercle de la librairie à la rentrée prochaine. La bibliothèque est un facteur de construction important dans une intercommunalité, notamment quand celle-ci est à cheval sur deux départements. Mais aucun modèle de coopération territoriale ne s’impose."
Une disparité de situations
Les témoignages ont illustré cette grande diversité de modèles et de points de vue. "Le regroupement territorial de Vallée Sud – Grand Paris s’est fait de manière un peu autoritaire autour de onze communes qui n’avaient pas forcément vocation à vivre ensemble", a posé d’emblée Chantal Brault, conseillère territoriale de Vallée Sud-Grand Paris, chargée de la lecture publique et de l'emploi, et première adjointe au maire de Sceaux, l’une des onze communes du territoire.
Dans les trois intercommunalités qui ont fusionné pour donner naissance à Vallée Sud-Grand Paris, certaines avaient transféré la gestion de la lecture publique au niveau intercommunal, d’autres pas. "Certains maires avaient construit de longue date une politique culturelle, et notamment de lecture publique, très importante. Il existe aujourd’hui de grandes disparités dans le fonctionnement, les services, la culture professionnelle, a poursuivi l’élue. Vallée Sud-Grand Paris a une grande envie d’élaborer une politique intégrative mais ce sera long. Le réseau apporte un accompagnement, une unité territoriale. Cependant, on trouve des réseaux de bibliothèques de grande qualité gérés au niveau communal, comme à Sceaux, qui a la seule bibliothèque ouverte le dimanche dans notre territoire, et qui porte un projet de rénovation de sa médiathèque très ambitieux. L’échelon communal offre une plus grande proximité avec les habitants que l’échelon territorial".
Autre composante de la Métrople, Grand Paris Sud compte 23 communes dans les départements de l’Essonne et de Seine-et-Marne et gère en réseau 9 médiathèques de 6 communes du territoire. "Le réseau apporte la qualité de l'offre documentaire mutualisée, permet de compenser les disparités de situations. Par contre, il crée une lourdeur dans la gestion administrative, a commenté Carole Ziem, présidente de l'association des directeurs des affaires culturelles d'Ile de France et directrice des affaires culturelles de Fontenay-sous-Bois. La difficulté est d’avoir une logique de réseau, de territoire, tout en travaillant localement".
Incertitude financière
Adrien Brun, directeur de la culture de l’établissement public territorial Est Ensemble, qui regroupe 9 communes en Seine-Saint-Denis, a rappelé quant à lui le choc ressenti par les équipes, qui travaillaient depuis deux ans au transfert de la gestion des équipements culturels du territoire à l’échelon intercommunal, en apprenant, en 2013, le vote par l’Assemblé nationale de la suppression d’Est Ensemble et des deux autres agglomérations de communes qui devaient intégrer la métropole du Grand Paris. "Cela nous a conduit à faire le choix d’un modèle horizontal basé sur la collaboration des directeurs des établissements culturels, qui ont appris à se connaître et se sont mis à construire un réseau, a expliqué Adrien Brun. Depuis, la loi NOTRe nous a redonné un statut, où chaque ville a un poids fort, ce qui correspond à notre fonctionnement historique. Mais financièrement, on ne sait pas comment on va fonctionner dans les deux ans à venir. La vocation du Grand Paris était à l'origine de favoriser une répartition plus équitable des moyens et des financements sur le territoire. Pour l'instant ce n'est pas le cas".
Mutualiser les moyens
"C’est une bonne nouvelle que les bibliothèques soient dans ce grand mouvement de recomposition des territoires, a souligné en conclusion Dominique Lahary, responsable de la commission Bibliothèques en réseau de l’Association des bibliothécaires de France. La convergence entre le niveau communal et le niveau intercommunal est délicate à gérer mais n’oublions pas que les intercommunalités sont des regroupements de communes. On n’est pas loin du public à l’échelon intercommunal, et proche à l’échelon communal. Les populations sont mobiles, il faut leur faciliter les choses".