En mai 1940, pendant le bombardement de Rotterdam par les nazis, la jeune Femke Versloot dessine la destruction de la ville où ses parents tenaient une librairie. En 2001, elle est désormais une femme de 79 ans grande et osseuse mais avec un éclat qui la rend encore "sexy et troublante".
L’héroïne du nouveau roman de Jake Lamar fume des Lucky Strike face à Toby White. Professeur d’université, celui-ci a rédigé une thèse sur l’expressionnisme abstrait, sur Jackson Pollock et sa technique du "dripping". L’une de ses étudiantes de premier cycle, la blonde Saskia Andersson, l’a ensuite amené à se pencher sur l’œuvre de Femke, sur qui il a même l’intention d’écrire un livre.
La grand-mère de Saskia, il est vrai, n’est pas un personnage banal. On sait qu’elle est arrivée à New York en 1948. Qu’elle s’est établie à Greenwich Village, où elle a côtoyé les grands artistes de son temps. Tels son compatriote Willem de Kooning ou Jackson Pollock - la légende veut que Femke lui ait un jour collé son poing sur la joue.
Ensuite, il y eut son installation à Sausalito, en Californie. La poursuite d’une œuvre qui a été peu à peu redécouverte. "Ils m’ont méconnue, et puis ils ont décidé de ne pas me connaître", lance Femke à Toby, lui affirmant encore : "Un artiste est ce qu’il est, à un moment donné de son existence, quand il pratique son art"… Jake Lamar enchante avec Postérité où il revient sur un mouvement artistique qui avait déjà inspiré John Updike pour Tu chercheras mon visage. L’auteur du Caméléon noir (Rivages-Noir, 2003) et de Nous avions un rêve (Rivages-Thriller, 2005, repris en Rivages-Noir) tisse parfaitement sa toile à mesure qu’il brosse le portrait d’une femme complexe. Une Femke qui a bâti sa propre légende en prenant soin de gommer les zones d’ombre…
Al. F.