Tranches de vie. L'éditrice éclectique Nathalie Fiszman a eu la bonne idée de relancer, dans sa collection « Studios Mogul » au Seuil, un genre littéraire mineur, le roman-photo, qui fit les choux gras d'une certaine presse à partir de l'après-guerre, et le bonheur de millions de lecteurs, souvent des lectrices. Les intellectuels, bien sûr, méprisaient, mais dévoreraient plus tard en cachette Hara-Kiri - qui n'était ni dans la romance ni dans le fait divers, mais dans la parodie, à la manière de Gotlib ou de Bretécher.
Pour son sixième opus, « Studios Mogul » a confié les clefs de la boutique à Nora Hamzawi, révélée dans l'émission Quotidien de Yann Barthès et qui, comme d'autres, en vient au livre. Et l'humoriste s'est choisi comme héroïne son double, finement prénommée Nora, dans les heurs et malheurs de sa vie conjugale. Un thème éternel, source inépuisable de vaudevilles ou, comme ici, de sketchs mis en mots par elle, et en images par le photographe Stephan Gladieu. Leur enchaînement véloce fait penser à un spectacle de stand-up, spécialité de la comédienne.
Nora, donc, est en couple avec un garçon, interprété tour à tour, entre autres, par Thomas VDB, Eddy de Pretto, Pierre Deladonchamps et même notre confrère Augustin Trapenard, lequel se voit affligé d'une mère possessive, intrusive, une enquiquineuse d'une parfaite mauvaise foi, interprétée magistralement par Josiane Balasko. Du genre à réclamer pour le réveillon du chapon plutôt que de la dinde, parce que c'est « moins sec », mais aussi plus cher ! Pour le reste, Nora subit les joies des chaussettes sales ou des toilettes squattées par son mec qui y lit le journal. Elle s'horripile aussi de sa tendance pathologique à la procrastination et au « je vais le faire », jusqu'à ce que la porte du salon s'écroule sur le fauteuil où il tapote sur son portable. Bobo middle class, elle aimerait bien faire chambre à part, mais l'appartement qu'elle partage avec Eddy de Pretto (et un enfant qu'on ne voit pas) n'a qu'une chambre, et le garçon refuse obstinément de dormir sur le canapé... Etc.
Ces soixante saynètes, d'une à deux ou trois pages, sont autant de courtes nouvelles, des tranches d'une vie qui parlent à chacun d'entre nous. C'est bien fait, drôle, parfois coquin, jamais vulgaire, piquant sans être méchant. On en redemande.
Couple. Splendeurs et misères de la vie à deux
Seuil
Tirage: 25 000 ex.
Prix: 20,90 € ; 112 p.
ISBN: 9782021563283