Singulier
« J'ai toujours détesté les groupes. Petit, je m'étais enfui d'une colo. » Cette soif de liberté se traduit dans les idées par le libéralisme. Le libéralisme dans son acception philosophique, « non pas le terme pollué et ramené au néolibéralisme économique qui n'a plus rien à voir avec son fondement originel », précise Gaspard Kœnig en citant Tocqueville et John Stuart Mill. Le fondateur du think tank GenerationLibre, « dédié à toutes les libertés », s'est fait connaître par des essais comme chantre de l'autonomie, mais n'est-ce pas à travers les romans qu'on arrive le mieux à donner une voix à la complexité des êtres ? Son tout premier livre, Octave avait vingt ans, était un roman.
Vagabond
« À sauts et à gambades », disait Montaigne pour décrire son style d'écrivain. Cette « allure poétique » de la pensée est un vagabondage. Réitérant le voyage à Rome de l'auteur des Essais, Gaspard Kœnig l'effectue, à l'instar de l'insigne humaniste, à cheval ! « Mon enquête sur l'intelligence artificielle, qui m'avait conduit aux États-Unis et en Chine, a été une vraie bascule. J'étais parti technophile, j'en suis revenu complètement déprimé. » D'où le voyage à cheval, très, très loin du monde connecté, à l'heure des algorithmes. La lenteur et les péripéties ont permis de « créer l'inattendu ».
Milieu
En route pour Rome sur sa jument, Kœnig a eu tout loisir de penser la question écologique que l'écrivain lie étroitement à celle de liberté. Plus qu'« environnement » ou « écologie », l'auteur d'Agrophilosophie préfère ce mot de « milieu » ainsi que l'entend l'anarchiste Élisée Reclus. Milieu comme milieu naturel, impliquant l'interaction entre toutes choses, tous êtres qui l'habitent. « Milieu » exprime sa place, ce juste équilibre : se tenir droit tel qu'en soi-même au sein de la communauté diverse du vivant.
Humus
C'est le titre de son précédent roman, mais humus, c'est à la fois le terreau et le territoire. Fils de journalistes soixante-huitards originaires d'Évreux devenus parisiens (son père, Jean-Louis Hue, dirigea longtemps Le Magazine littéraire où écrivait également sa mère Anne-Marie Koenig), Gaspard Kœnig a désiré s'ancrer dans le bocage en s'installant dans l'Orne. Prendre soin du vivant n'occulte pas le respect de la singularité de chacun. Au contraire, pour Kœnig, fustiger la bureaucratie, lutter contre l'agriculture intensive, même combat !
Simple
La réduction n'est pas forcément réductrice. La sobriété sauvera le monde. Retour aux éléments que nous avons en partage, revenir à l'essentiel, vital et limité - « les communs » comme l'eau (Aqua est le titre de son nouveau roman)... À l'époque, Kœnig ne s'était guère intéressé à ce que désirait lui inculquer sa mère, autrice de Carnets d'un jardin, à travers les gestes simples du jardinage. Avec les pommes de son verger dont il fait du jus, l'autre sens de la culture, il le comprend bien maintenant.
Aqua
Éditions de l'Observatoire
Tirage: 60 000 ex.
Prix: 23 € ; 448 p.
ISBN: 9791032932025
