Un tribunal espagnol a refusé, dans une décision publiée jeudi 25 octobre, de fournir des documents à une juge argentine enquêtant sur la mort du poète Federico Garcia Lorca, fusillé en 1936, en invoquant la prescription des faits et une loi d'amnistie.
"La demande argentine de coopération judiciaire internationale ne peut être acceptée", écrit le juge de l'Audience nationale, haute juridiction basée à Madrid, dans ce document daté du 22 octobre.
En août 2016, la juge de Buenos Aires Maria Servini avait inclus le cas de l'écrivain dans une enquête, ouverte en 2010, sur les violations des droits de l'Homme pendant la guerre d'Espagne (1936-1939) et la dictature de Franco (1939-1975) au nom de la compétence universelle.
Ce principe, appliqué dans quelques pays dont l'Argentine, le Chili ou le Sénégal, permet aux tribunaux d'enquêter sur des crimes graves commis à l'étranger.
L'Espagne n'a pas ratifié la convention sur l'imprescriptibilité
La juge Servini souhaitait accéder à un rapport que détient le ministère espagnol de l'Intérieur et à d'autres documents sur la mort de Federico Garcia Lorca. Le poète et dramaturge espagnol a été fusillé par les franquistes, près de Grenade, en août 1936, aux premiers jours de la guerre civile et ses restes, jetés dans une fosse commune, n'ont jamais été retrouvés.
Mais le crime ayant eu lieu il y a plus de 80 ans, "le délai de prescription prévu pour celui-ci dans le Code pénal espagnol est écoulé", estime le tribunal espagnol. La juge Servini estime qu'il s'agit d'un crime contre l'humanité, mais Madrid "n'a pas ratifié la convention sur l'imprescriptibilité" de ces crimes qui permettrait de les juger sans limite de temps, rappelle l'Espagne.
Sa demande "entre également en conflit avec la Loi d'amnistie de 1977", qui a empêché au nom de la transition vers la démocratie toute poursuite pour des délits politiques, pour les opposants à Franco, mais aussi pour ses partisans.
Maria Servini avait ouvert son instruction à la demande de familles de victimes du régime franquiste, qui ont saisi la justice argentine en invoquant les obstacles posés en Espagne par cette loi.