édito par Christine Ferrand, rédactrice en chef

Comme le montre No, le film de Pablo Larraín sur le référendum organisé par Pinochet en 1988, pour vaincre, il faut ringardiser l’adversaire. Soit, pour le livre : Internet, qui vole du temps de lecture, tous les loisirs câblés et fugitifs, qui en détournent, Amazon, qui fragilise la librairie… Il faut surtout conjuguer la lecture sur le mode plaisir en mobilisant forces et idées pour lui redonner son pouvoir d’attraction, sa modernité, sa valeur d’échange et de partage.

Dans ce numéro, largement diffusé au Salon du livre de Paris, nous nous sommes tournés vers des personnalités extérieures au monde du livre, toutes particulièrement charismatiques, pour leur demander de définir ce que leur apporte la lecture. Comédiens, chanteurs, architectes, stylistes, chorégraphes ou sportifs : trente d’entre eux ont tenu à exprimer, avec une conviction très personnelle, tout ce qu’ils doivent aux livres et nous ont livré, dans la foulée, quelques idées pour les remettre au centre de la vie. Beaucoup prônent, comme Edouard Baer, leur désacralisation, le droit de sauter des pages, de ne pas lire sur prescription scolaire… D’autres comme l’architecte Bernard Tschumi sont persuadés qu’il faut de toute urgence les réinstaller dans leur dimension physique, « développer unestratégie de l’objet ». Si Miou-Miou partage ses ouvrages préférés en les déposant dans des abribus, ils sont nombreux à vouloir, comme Christian Lacroix, les faire sortir de leur cadre habituel : « Il faut en mettre partout, comme des friandises », nous dit le grand couturier. Les comédiens, comme Guillaume Gallienne, parient sur la lecture à haute voix pour « contaminer » leur public. Le slameur Abd Al Malik imagine des « caravanes d’écrivains » qui iraient de ville en ville au-devant des lecteurs et le rappeur Ekoué Labitey, du groupe La Rumeur, pense qu’on revivifiera le livre par des prestations des auteurs en « live ».

Des écrivains en chair et en os : bien des librairies sont désormais convaincues de la nécessité d’organiser des rencontres entre lecteurs et auteurs. Et ce n’est pas tout à fait un hasard si l’on retrouve les plus actives dans ce domaine dans notre classement 2012 des 400 premières librairies françaises. Les auteurs seront aussi nombreux, en « live », au 33e Salon du livre, qui ouvre ses portes ce vendredi 22 mars, et qui, une nouvelle fois, conjuguera livre et plaisir.

11.10 2013

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