Haie vive, idée vulgaire, âme moutonnière et gazouillis incessant, les associations de mots farfelues et poétiques de Michelle Grangaud ne se reproduiront plus. La poétesse, spécialiste de l’anagramme et membre de l’OULIPO est décédée à l’âge de 80 ans ce samedi 15 janvier à Bric-Comte-Robert.
Née le 11 octobre 1941, Michelle Grangaud passe les vingt premières années de sa vie à Alger avant de partir à Montpellier où elle devient enseignante de lettres. Une vie qu’elle quitte en 1977 pour un poste d’attachée d’administration au rectorat de Paris. Elle y redécouvre la capitale qu’elle avait tant aimée durant son enfance : « j'ai aperçue pour la première fois [Paris] à douze ans, qui m'a séduite d'emblée, et durablement. » et s’en inspire dans de nombreux textes comme Stations (P.O.L, 1990) ou Jour le jour (P.O.L, 1994).
Je de mots
En 1983, alors âgée de 42 ans, Michelle Grangaud découvre l’anagramme comme objet poétique durant la visite d’une exposition consacrée à l’artiste Unica Zürn. Dès lors, elle ne cessera d’écrire pour publier son premier recueil d’anagrammes, Memento-fragments (P.O.L) en 1987. « Pendant tout un temps j’ai été fascinée par le processus de l’anagramme parce que cela me faisait venir des idées qui ne me seraient jamais venues spontanément. », dira-t-elle d’ailleurs à John Stout durant un entretien en 2003. Rapidement, elle est remarquée par les membres de l’OULIPO qui lui ouvriront leurs portes dès 1995 puis par le magazine Action poétique auquel elle contribue.
Amatrice des contraintes formelles, elle joue avec les lettres et les mots afin de produire une émotion sans lyrisme. Michelle Grangaud se plait également dans l’art de l’inventaire qu’elle réalise avec force d’accumulations et de juxtapositions ainsi que dans le dialogue permanent entre littérature du passé et écriture contemporaine. « Michelle Grangaud fût une grande poètesse avec une soif encyclopédique des mots », résume Jean-Paul Hirsch, le directeur commercial de P.O.L.