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La paradoxale valeur des métadonnées du livre

La paradoxale valeur des métadonnées du livre

Au forum du GFII, un atelier de discussion a réuni cinq producteurs de métadonnées de livres imprimés ou numériques, qui témoignent d’une demande grandissante dans un contexte économique contraint.

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Par Hervé Hugueny,
Créé le 08.12.2014 à 18h51 ,
Mis à jour le 09.12.2014 à 14h03

Les métadonnées décrivant le livre, imprimé ou numérique, ont une valeur qualifiée de stratégique dans l’économie dématérialisée, et pourtant l’information brute elle-même ne vaut quasiment plus rien dans la mesure où elle est disponible partout sur Internet: c’est le paradoxe évoqué lors d’un atelier organisé au forum du Groupement français de l'industrie de l’information (GFII) à Paris les 8 et 9 décembre. Le GFII réunit producteurs, éditeurs, agrégateurs et diffuseurs d'information.
 
“Les métadonnées au cœur de l’écosystème du livre”, selon l’intitulé de cette discussion, n’échappent pas aux contraintes économiques du secteur ainsi que l’ont souligné cinq acteurs présents. Ils produisent des bases bibliographiques qui se recoupent, se complètent et se concurrencent plus ou moins: la bibliographie nationale produite par la Bibliothèque nationale de France (BNF) depuis plus de deux siècles, la base interprofessionnelle Electre dont l’origine remonte au milieu du XIXe siècle (1), celle du libraire Decitre, le catalogue du Système universitaire de documentation (Sudoc) produit par l’Agence bibliographique de l’enseignement supérieur (ABES) ou encore la base créée par Lavoisier pour les besoins de sa production et de sa diffusion numérique."

"Les métadonnées sont un bien commun"
 
Depuis le 1er janvier 2014, la BNF laisse gratuitement l’entière disposition de son catalogue databnf.fr à tous les utilisateurs, même à ceux qui en feraient un usage commercial, la seule contrainte étant d’indiquer la source. “Les métadonnées sont un bien commun dont il faut défendre l’accessibilité à tous, c’est une de nos missions” insiste Gildas Illien, directeur du département de l’information bibliographique de la BNF.
 
Cette gratuité a un coût, celui de l’impôt qui la finance a rappelé Guillaume Decitre, sensible au sujet. Le P-DG du réseau de librairies du même nom qui a créé une base pour ses besoins avant de la commercialiser, y compris à Amazon, pour en amortir la charge, a défendu “la libre concurrence qui encourage l’innovation”. Il s’est étonné au passage du fait que “les éditeurs font payer aux libraires les informations du catalogage de leur production” en ne prenant pas cette activité à leur charge: “c’est la seule industrie qui fonctionne ainsi”, a-t-il insisté.
 
Dans son rapport publié en 2008, Bruno Patino s’était fait l'écho d’un souci de rationalisation, estimant que la production de plusieurs bases à partir d’une même ressource était un gaspillage de moyens et d’énergie, et se prononçait pour l’unification de ces initiatives. Sans aboutir à cette fusion générale, les contraintes et les avantages de l’économie numérique entraînent néanmoins un rapprochement entre une partie des acteurs, notamment la BNF et l'ABES.

L’intégration de la production auto-éditée

Certaines données de la BNF sont aussi en partie réutilisées par les bases commerciales, qui, elles, répondent à des besoins de rapidité de production pour les nouveautés que l’institution n'assure pas. Electre s’est pour sa part engagée dans un programme d’enrichissement des métadonnées du livre autour de la notion d’œuvre, afin d'identifier les multiples déclinaisons d’un ouvrage premier, a expliqué Pierre Boudigues, directeur des projets et systèmes d’information. Autour de la solution fournie par Antidot, la base interprofessionnelle a aussi enrichi ses notices en les rapprochant du contenu produit par Livres Hebdo.
 
Un autre défi à résoudre est l’intégration de la production auto-éditée, pour le moment un quasi-monopole d’Amazon, s’inquiète Guillaume Decitre, qui connaît bien à la fois son premier client, et premier concurrent. Côté universitaire, l’ABES recherche un outil de gestion de flux numériques assez performant pour répondre à la fois à l’information sur les agrégateurs de contenus, et sur le niveau le plus fin de l’identification de ces contenus que sont les chapitres de livres ou les articles de revues, a expliqué Benjamin Bobber, responsable du projet Base de connaissance nationale (BaCon).
 
Tous poursuivent en tout cas l’objectif de permettre la découverte de ces contenus dans l’immensité des ressources disponibles, qui s’accroît en permanence: la masse est telle que personne ne peut plus prétendre seul à l’exhaustivité.

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