Les maisons aux esprits. Régulièrement publiée en France, l'œuvre de la mangaka Kei Toume (Sing « Yesterday » for Me, Delcourt, 2003-2013, en cours de réédition ; Jimbôchô Sisters, Mangetsu, en cours...) recèle encore de belles surprises, comme ce Mahoromi, série en quatre tomes écrite dans les années 2010 et redécouverte aujourd'hui par Le Lézard Noir. Petit-fils d'un célèbre architecte qu'il a très peu connu, Tôya est lui-même étudiant en architecture et stagiaire dans une agence. Amené à visiter des vieilles maisons des années 1920-1930 promises à la démolition, Tôya se découvre un pouvoir hors du commun : celui de ressentir l'âme et les souvenirs des bâtiments. Lorsqu'il est en compagnie de Mayuri, une jeune femme possédant un don similaire, il visualise des choses que les constructions ont à révéler, en général des événements restés en suspens qui s'y sont produits. Les deux jeunes gens s'efforcent alors de leur donner une conclusion, souvent mélancolique. Dans ce deuxième tome, Tôya et Mayuri réconcilient une jeune traductrice avec son passé et découvrent la vérité derrière une mort mystérieuse à la bibliothèque de l'université des années auparavant. En parallèle, ils en apprennent un peu plus sur leurs grands-parents qu'unissait un lien mystérieux. Kei Toume dose tous les éléments de son manga à la perfection : une histoire au long cours (les liens entre les jeunes gens et leurs grands-parents) bien tenue ; quelques touches de fantastique auxquelles on adhère facilement ; des petites intrigues (les cas que résolvent Tôya et Mayuri) toujours variées ; des scènes de comédies, entre Tôya, ses collègues et ses amis, qui donnent du rythme. Les nombreux personnages secondaires, bien campés, rendent le récit particulièrement vivant. Loin d'être des faire- valoir, ils ont avec Tôya des conversations qui permettent à l'autrice d'aborder divers sujets de réflexion : qu'est-ce qu'une vocation ? est-il pertinent de conserver des constructions anciennes au nom de la sauvegarde du patrimoine quand la place manque pour de nouveaux logements ? quelle est l'âme d'un paysage urbain dépourvu de bâtiments historiques ?
Empreint de belles idées poétiques et dessiné d'un trait doux sachant se faire précis quand il s'agit de représenter les vieux édifices, Mahoromi tient toutes les promesses de mystère et d'élégance suggérées par son intrigant sous-titre, « Chroniques architecturales de l'espace temps ».
Mahoromi. Chronique architecturale de l'espace temps, vol. 2
Le Lézard noir
Traduit du japonais par Adrien Blouët
Tirage: 2 000 ex.
Prix: 13 € ; 212 p.
ISBN: 9782353484355
