Symptomatiquement, mardi 17 mai, la 3e édition de Shoot the Book ! à Cannes a fait le plein, avec plus de 120 participants. Dans le palais des Festivals, la traditionnelle session de “pitchs” de 10 ouvrages sélectionnés a permis des premiers contacts entre éditeurs et producteurs. Le défi n’était pas évident à relever dans un contexte où de nombreux accrédités au marché du film ne sont pas venus au Festival de Cannes par peur des attentats, des grèves de train et d’avion annoncées, ou tout simplement parce que des tournages les retiennent. Mais la très forte présence chinoise et l’arrivée en force de producteurs de nouveaux pays émergents ont évité une baisse de fréquentation.
Deuxième session de rendez-vous
Cette année, la nouveauté de cette rencontre professionnelle entre éditeurs et producteurs audiovisuels résidait dans une deuxième journée de rendez-vous, dans le pavillon des Cinémas du monde, à proximité de la plage du Majestic. Mercredi matin, dans une ambiance moins solennelle que la veille, les rendez-vous s’enchainaient à différentes tables. 22 livres (pour autant d’éditeurs) ont fait l’objet de discussions entre des professionnels du cinéma et les chargés de droits audiovisuels de Gallimard, Plon, Stock, Media Participations, Fayard et d’autres.
Pour Anne Tallineau, directrice générale de l’Institut français, partenaire de l’événement aux côtés de la Scelf, du Bief, de la commission du film Ile-de-France et du Motif, le rendez-vous s’est installé durablement sur la Croisette. “Tout le monde a compris l’interpénétration de l’écrit et de l’image et la nécessité de s’internationaliser”, explique-t-elle à Livres Hebdo. Le format a pris, et nous le maintiendrons sur deux jours car cela permet plus de rencontres, plus de temps et la valorisation de plus d’éditeurs”, ajoute-t-elle.
Un effet indéniable
Il est toujours difficile de mesurer l’effet immédiat de ce type de rencontres professionnelles. Au moins trois projets ont été signés depuis la création de Shoot the Book ! Mais la directrice générale de l’Institut français affirme que l’important se situe dans le réseautage. “L’effet est plus diffus, sur le long terme, mais le face à face est indispensable pour qu’un projet puisse naître”, souligne-t-elle.
C’est aussi l’avis de Joanna Gaillardo, chargée des coproductions à la commission du film Ile-de-France. Avec le Salon du tournage de film, l’opération “Un livre, un lieu“ et Shoot the Book !, l’organisme régional est persuadé que, pour valoriser la production cinématographique, il est nécessaire de trouver de bons sujets : “Un des meilleurs viviers pour en trouver, c’est la littérature”, affirme-t-elle. La synergie avec le Motif est à ce titre évidente et assimilée. Pour la commission et le Motif, l’intérêt est de valoriser son territoire, mais aussi de dynamiser les industries culturelles, qui pèsent économiquement.
Si tous sont satisfaits de venir sous le soleil cannois (sans avoir forcément le temps de monter les marches) et de voir le grand nombre de films adaptés de romans ou essais présentés dans les sélections, il reste maintenant à accompagner ce nouveau marché. D’autres festivals ont davantage intégré les droits audiovisuels dans leur programme professionnel. Le Festival de Cannes et le marché du film ont encore un peu de retard par rapport à Berlin ou aux métropoles des Emirats. Il ne s’agit pas seulement de mentionner le titre d’un livre et son auteur dans le catalogue pour chaque film adapté. Il sera sans doute nécessaire d’avoir, dans un avenir proche, un espace au sein du marché dédié aux cessions de droits. “Venise y réfléchit”, assure Anne Tallineau.