14 janvier > Roman France

Dans la note d’intention fournie par son éditeur, Mikaël Ollivier revient sur la genèse de ce recueil, dont douze des quinze nouvelles avaient été publiées confidentiellement en 2006 chez un petit éditeur disparu depuis. Pour n’être pas explicitement autobiographique, comme Celui qui n’aimait pas lire (De La Martinière Jeunesse, 2004), le livre est néanmoins largement inspiré de sa propre expérience de père et de fils. L’écrivain à la tête d’une imposante bibliographie qui compte de nombreux romans pour la jeunesse et emprunte à tous les genres, se souvient du point de départ de ces microfictions quand, peu de temps après la naissance de son aînée, il a anticipé dans un rêve désagréable cette première fois où un amoureux de sa fille viendrait passer le week-end sous le toit familial. Ce cauchemar transposé est devenu l’histoire la plus comique de ce livre à la tonalité plutôt douce-amère, parfois même totalement tragique, qui décline un large spectre de relations entre des pères et leurs enfants à divers âges de la vie.

Aux côtés de ce personnage de père crûment jaloux qui ne censure rien des émotions ambiguës qu’il ressent, on trouve donc toute une galerie de pères contemporains : des pères fiers ("Le récital"), des pères taiseux, des pères en fin de vie ("La coda"), des pères fiables, des pères tendres, des pères impuissants, des pères éparpillés - "sept enfants de quatre femmes différentes étaient un véritable casse-tête " ("Les initiales") -, des pères pénibles, des pères intermittents, des pères frustrés… Dans "Basile", un quinquagénaire souffre de passer plus de temps avec le chien de sa maîtresse qu’avec ses jumeaux de 10 ans. Plus dramatique, "Born to fuck" met en scène un écrivain à succès qui juge "parfaitement inécoutable" la musique de sa star de fils à qui il n’a pas parlé depuis quatre ans et dont il suit à la télé la retransmission du concert "événement musical de l’année". Mikaël Ollivier a ainsi collectionné des histoires d’amour paternel qui parlent du temps qui passe et de transmission, de distances qui se creusent et d’intimité sans mots, d’étapes irréversibles : le nid vide après le départ de l’enfant devenu étudiant, la première défaite au tennis face à un fils adolescent, le monologue noué d’un père en garde partagée qui ramène ses enfants à leur mère le dimanche soir.Autant de modes d’une paternité en actes, concrète et incarnée, faite de nez qu’on mouche, d’histoires du soir, de comptines chantées en chœur dans la voiture. Et où avec entre autres choses, "regarder la mer", "manger des huîtres" et "finir un bon roman", "apprendre à marcher aux enfants " se range parmi les plus grands plaisirs que peut offrir une vie d’homme. V. R.

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