Sursollicités, les imprimeurs rencontrent souvent des difficultés à honorer les commandes. Pour réduire les aléas, les éditeurs multiplient les prestataires. Imprimer à tout prix. Pour optimiser leurs chances d'obtenir les qualités de papier dont ils ont besoin, les éditeurs multiplient le nombre de leurs imprimeurs. Amphora a par exemple changé d'imprimeur dès juin 2021. « Nous imprimions beaucoup en Espagne, nous sommes maintenant aussi en Slovénie, en Turquie et en Chine en fonction des caractéristiques de nos ouvrages », explique Renaud Dubois, le directeur général. Chez La Martinière, les services de fabrication ont eux aussi élargi leur panel d'imprimeurs. « Nous travaillons avec cinq ou six imprimeurs supplémentaires en Espagne, Italie, Pologne et Slovénie », confirme le directeur général délégué Séverin Cassan. 

S'en tenir à un nombre restreint de partenaires devient l'exception. Bruno Doucey, par exemple, achète depuis des années du « papier en fabrication », stock de papier qui reste disponible chez son imprimeur sans variations de prix. « Grâce aux bonnes relations entretenues avec nos imprimeurs, nous avons pour l'instant pu continuer à procéder ainsi, même si cela devient de plus en plus compliqué, témoigne Bruno Doucey. Il faudra sans doute inventer de nouveaux modes de fonctionnement dans les mois à venir. » 

Systèmes de quotas

La diversification des prestataires tient autant à la nécessité d'optimiser les chances de trouver le papier adéquat que de contourner les systèmes de quotas par pays instaurés par les papetiers pour empêcher les grands groupes d'accaparer tous les stocks. « Les imprimeurs nous expliquent qu'ils ne peuvent pas dépasser un certain nombre d'exemplaires pour nous, cela nous oblige à chercher des prestataires dans d'autres pays », confirme Marine Barreyre, chef de fabrication chez AC Media. De quatre imprimeurs réguliers, AC Media est passé à sept au cours des 12 derniers mois. 

Certains éditeurs sont déjà habitués de longue date à fonctionner avec un pool d'imprimeurs. « Cette approche s'avère particulièrement pertinente dans la conjoncture actuelle », souligne Hélène Hoch, directrice de la rédaction civil/pénal et ouvrages chez Lefebvre Dalloz. La marque du groupe Lefebvre-Sarrut reste néanmoins en veille et renouvelle régulièrement ses prestataires. Au printemps dernier, elle a par exemple changé d'imprimeur pour limiter le retard de parution de plusieurs de ses codes.  Les délais sont en effet au cœur de la relation imprimeur/éditeur. « Le prix est important, mais c'est surtout la disponibilité qui compte», souligne Philippe Berteaux, directeur général d'Estimprim. S'il parvient à honorer la plupart des commandes, l'imprimeur alerte sur la nécessité d'anticiper. « Nous n'avons pas le temps de rentrer du papier pour les demandes urgentes », reconnaît-il. Un casse-tête pour les éditeurs, contraints d'anticiper une réalité commerciale qu'ils ne maîtrisent pas.  « Commander le papier d'un tome 3 alors que le tome 1 n'est pas encore paru oblige à faire des paris » , déplore Marine Barreyre. 

Les dernières
actualités