Essai/France 5 juin Daniele Vegro

Il y a chez Galilée quelque chose comme la force de l'évidence. Sauf que cette évidence ne saute pas aux yeux des autres, notamment à ceux des membres de la curie et de l'Inquisition. C'est souvent le cas avec les lois de la physique. Elles ne sont pas flagrantes, elles défient quelquefois même le bon sens, et pourtant elles disent vrai.

C'est bien ce que met en relief ce journal imaginaire de Galilée (1564-1642). Durant onze jours, de la fin du mois de janvier 1933 au début de février, le savant est confronté au dilemme de la vérité scientifique. Contre lui, il a les dévots et les disciples d'une physique toujours inspirée par Aristote. Avec lui, il a Copernic, mort depuis 90 ans. Son système héliocentrique - la Terre tourne autour du Soleil et non l'inverse comme dans le modèle de Ptolémée - est considéré comme hérétique. Mais Galilée n'en démord pas et il s'en faudrait de peu pour que son protecteur, le pape Urbain VIII, n'abonde dans son sens.

Mais voilà, Galilée n'est pas un homme prudent. Certes il voit plus loin grâce à sa lunette astronomique, mais ses ennemis n'en ont cure. Il explique donc aux prêtres que l'univers a son langage et qu'il ne peut se comprendre sans figures, sans chiffres et sans calculs. Il énonce pour la première fois la mathématisation de la physique. Evidemment cela ne plaît pas, d'autant qu'il n'y met pas les formes. Pour peu il ferait passer ses contradicteurs pour des idiots ou pire pour des incultes. Mais cette irrévérence-là a conduit Giordano Bruno sur le bûcher. Galilée ne cesse de penser à ce corps brûlé sur le Campo di Fiori à Rome en 1600. Et il tremble tout de même quelques décennies plus tard de subir le même sort.

Sur un sujet connu, Daniele Vegro a réussi son coup. Auteur d'unAnti- dictionnaire de physique(Vélin, 2016), cet architecte dévoile un Galilée truculent, passionné et inquiet. Dans sa retraite qui le protège de la mort tout en préservant le ministère du pape Urbain VIII il en vient à maudire son temps où les superstitions l'emportent sur le raisonnement. En s'appuyant sur les textes de et sur Galilée il parvient à un très original travail d'histoire des sciences qui s'autorise les libertés de l'imagination.

Daniele Vegro
Moi, Galilée, qui ne suis qu’un homme
Belin
Tirage: 2 500 ex.
Prix: 21 euros ; 392 p.
ISBN: 9782410014426

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