21 août > Roman France

Avec un titre ironique délicieusement rétro, Catherine Cusset signe un roman drôle et cruel, irrespectueux et libertaire. Son héroïne et narratrice, Marie, est une jeune bourgeoise, confite en dévotion. Son père, catholique extrêmement pieux, a apparemment gagné : toute la famille croit, va à la messe et à confesse. Toute ? Non. La mère, athée d’origine juive, résiste dans son coin.

Mais Marie va assez tôt manifester les signes d’un certain nombre de "déviances". D’abord, elle éprouve vis-à-vis d’Anne, sa sœur aînée de trois ans et demi, une haine viscérale, jalouse, absolue. Sentiment fort peu chrétien, qui durera toute leur enfance. Jusqu’à ce qu’Anne, mariée et mère d’un petit Thomas, voie le nourrisson mourir dans son lit. Drame atroce et traumatisme violent pour Marie, qui, d’un coup, la fera basculer dans le réel, à sa façon, hystérique. D’autre part, sous le rapport de l’orientation sexuelle, elle se cherche, entre la "lumière" des filles, et sa part d’"ombre", les garçons. Elle tombe ainsi amoureuse et sous la coupe de Nathalie, avec qui elle apprend à voler dans les magasins, de Ximena, la surdouée tyrannique, de Madame Brasier (sic), sa prof de français. A chaque fois, ça se termine en drame, par des ruptures passionnelles, des inimitiés acharnées. Elle s’éprendra même de sa psy ! Côté hétéro, il y aura David, amour platonique et non réciproque, un vague dépucelage à Vienne par un homme marié, puis Samuel, un juif non croyant avec qui elle va vivre une histoire tumultueuse durant six ans. Elle éprouve pour lui, qui lui a fait connaître pour la première fois l’orgasme, un puissant désir physique. Mais elle n’hésite pas à le tromper avec Francesco, l’éphèbe sarde. Ce n’est qu’au bout de bien des échecs et des épreuves que Marie se "stabilisera" aux Etats-Unis, avec Al, qu’elle épouse.

On imagine bien que certains éléments de ce roman tragi-comique sont peu ou prou autobiographiques, même si Catherine Cusset possède l’art de tout faire sonner juste. Peu importe. Le lecteur se délecte de ces intermittences du cœur féminin, contées avec franchise et crudité, et où l’on trouve quelques sentences définitives, comme : "L’amour est une question de foi." Le "chanoine" Mauriac, après avoir feint d’être scandalisé, aurait adoré. J.-C. P.

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