Pour la sémiologue Mariette Darrigrand, le phénomène répond à quatre besoins : « besoin de liens, de lieux, de beau et de savoirs ». Marie Sellier (SGDL) remarque de son côté la vitalité des clubs de lectures chez les jeunes, notamment à travers les blogs d'adolescents, « hyper-vitaminés, où circulent des vidéos et où s'expriment les groupes de fans ». Un lexique nouveau circule ; entendez Pal, comprenez « pile à lire », lisez TBR (pour to be read). Des chats y sont organisés entre un auteur et ses lecteurs.
Daniela Faraill, chargé des relations internationales du Festival du premier roman de Chambéry, a détaillé son expérience dans un réseau de 3 500 lecteurs dont 70% résident en région Rhône-Alpes et 20% à l'étranger. Ils lisent près de 70 premiers romans chaque année et votent en février pour une sélection. La manifestation est ainsi « trés participative », même si « les débats sont parfois saignants ». Responsable du club des lecteurs d'Orange, Françoise Fernandez qualifie son public de peu parisien, jeune, parfois isolé et qui a besoin de donner son avis, de vaincre sa timidité. Partout, une constante, ces clubs sont majoritairement féminins.
Marine Jubin a ainsi raconté l'histoire des « Filles du loir », un club qui fêtera bientôt ses dix ans. Pour 40 euros par an, chaque adhérent reçoit cinq livres. Elle a vu apparaître « la construction d'un nouveau discours littéraire par des amateurs ». La lecture, en passant de la sphère intime au collectif, se transforme : « On ne lit plus de la même manière ». Son association vient de créer une revue papier et lancera l'an prochain une plateforme participative sur Internet.
Avec cette dimension virtuelle, commencent les interrogations de Claire Zahra, directrice de la nouvelle médiathèque de Vinon-sur-Vernon. Elle veut créer son club « à partir d'un territoire » et souhaite pouvoir rester en contact physique avec son public.
Au moins tous ces professionnels (et ceux présents dans la salle) se sont accordés sur quelques acquis.
Les clubs désacralisent la lecture, décloisonnent et créent de l'émulation. Ils apportent un regain de vitalité aux manifestations littéraires, aux bibliothèques et ils donnent quelques raisons d'espérer. Jusqu'où ces lecteurs-là n'iront-ils pas ?