Avant-critique Young Adult

Charlotte Bousquet, Christine Féret-Fleury, Fabien Fernandez ; illustrations Ian Jepson, "La passerelle des damnées" (Milan)

Fabien Fernandez - Photo © DR/Bayard

Charlotte Bousquet, Christine Féret-Fleury, Fabien Fernandez ; illustrations Ian Jepson, "La passerelle des damnées" (Milan)

Écrit à six mains par Fabien Fernandez, Charlotte Bousquet et Christine Féret-Fleury, ce roman d'horreur met trois adolescents face à leurs démons intérieurs.

Parution 5 février

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Par Léon Cattan
Créé le 07.02.2025 à 14h00

Les griffes de la nuit. Ça commence comme dans tous les films d'horreur ou presque : par un déchaînement des éléments, signe d'un désordre à venir. Dans une station-service, trois adolescents attendent la fin d'une tempête de neige. Le soir d'Halloween de surcroît, soit au moment où le voile entre les morts et les vivants s'affaiblit - qu'est-ce qui pourrait mal se passer ? Beaucoup de choses, si l'on en croit les slasher movies des années 1990. Une influence bien digérée par La passerelle des damnées, un roman écrit à six mains par Fabien Fernandez, Charlotte Bousquet et Christine Féret-Fleury. Mais ici, exit les litres d'hémoglobine, les castes lycéennes et les pavillons résidentiels typiques des États-Unis où l'horreur s'invite sous un masque. La passerelle des damnées est un récit d'effroi à la française, niché dans les entrelacs d'autoroutes où quelqu'un a eu la bonne idée de construire un musée accolé à une station-service. Abandonné, il conserve la mémoire d'un épisode peu reluisant de l'histoire européenne, celui de la chasse aux sorcières. Même les amateurs d'exploration urbaine les plus audacieux n'oseraient pas s'y aventurer, mais pour les trois protagonistes du roman, Maxance, Hadrien et Nadia − dont les points de vue alternent, ce qui dynamise l'écriture −, ce n'est pas vraiment un choix. Liés d'une camaraderie soudaine et inexplicable, les adolescents se retrouvent confrontés aux plus sombres secrets du lieu qui les tient captifs... Autre motif typique de l'horreur, la menace surnaturelle comme un miroir, renvoyant celui qui s'y contemple à ses démons intérieurs avec, dans le roman, la volonté de jeter une lumière sur la santé mentale des plus jeunes − un sujet qui s'insère doucement, mais sûrement, dans le paysage de la littérature jeune adulte.

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Christine Féret-Fleury- Photo © DR/BAYARD

"Nous sommes les petites-filles des sorcières que vous n'avez pas pu brûler." Aujourd'hui, il n'est pas rare de tomber sur ce slogan féministe au détour d'une manifestation ou d'un tract. Impulsé par des essayistes comme Mona Chollet, le retour en force des sorcières imprègne inéluctablement La passerelle des damnées en adoptant un point de vue intéressant, bien que mentionné d'une manière allusive : Maxance, visiblement douée de clairvoyance, Hadrien et Nadia, ne sont pas les petits-enfants des rescapées des chasses aux sorcières, mais au contraire, les descendants de ceux qui ont laissé faire. Amorçant une réflexion sur la réparation générationnelle et l'esprit immortel des persécutés d'antan ? Une suite est en tout cas suggérée, à travers une conclusion que certains pourraient trouver quelque peu racoleuse.

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Charlotte Bousquet- Photo ©DR/BAYARD
Charlotte Bousquet, Christine Féret-Fleury, Fabien Fernandez ; illustrations Ian Jepson
La passerelle des damnées
Milan jeunesse
Tirage: 4 500 ex.
Prix: 16,90 € ; 288 p.
ISBN: 9782408045364

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