Cela fait 53 ans que ça dure. La Foire du livre de jeunesse de Bologne, qui s’est déroulée du 4 au 7 avril, reste un rendez-vous indispensable pour les acteurs du secteur où se sont rendus 1 200 exposants de 70 pays et 864 journalistes de 33 pays. "C’est un bon Bologne. Il y a eu plus de monde dès le lundi avec des gens très professionnels, qui savent exactement ce qu’ils cherchent et des stands plus beaux, plus sophistiqués" commente Hedwige Pasquet, directrice de Gallimard Jeunesse. "Il y a une vraie effervescence" confirme Sophie Giraud d’Hélium.
 

La foire fait toujours la part belle à l’image et fêtait avec brio les 50 ans de son exposition des illustrateurs, sous le titre "Artists and Masterpieces of Illustration. 50 years of Illustrator’s Exhibitions 1967-2016" dans laquelle défilaient tous les grands noms qui ont fait l’histoire de l’illustration, de Bruno Munari à Fabian Negrin, en passant par Roberto Innocenti, Chiara Carrer, Quentin Blake, Tony Ross, Jean Claverie, Yan Nascimbene, Kveta Pacovska et Shaun Tan.

S’ajoutaient la traditionnelle "Exposition des illustrateurs" et ses 77 artistes présentés, qui a battu des records avec 15 955 travaux soumis par 3 191 illustrateurs de 61 pays , un Café des illustrateurs, "Look !", l’exposition du pays invité, l’Allemagne ainsi que le mur dazibao où les jeunes postent leurs travaux et coordonnés quand ils ne promènent pas leur book dans les allées.

French touch recherchée

Taïwan et la Pologne ont été remarqués pour la qualité de leurs illustrateurs mais la "French Touch" est toujours recherchée. "Les éditeurs américains viennent chercher la qualité française" confirme Aurélie Lapautre, responsable des droits d’Albin Michel Jeunesse, qui a eu des contacts avec les dix-neuf éditeurs de Mon amour, qui veulent la suite, Un amour de petite sœur. De son côté, le nouveau pop-up de Gérard Le Monaco, publié à la fois par Hélium et Thames & Hudson a déjà sept coéditeurs. Tandis que l’Atelier du poisson soluble a eu son best-seller avec Les coulisses du livre jeunesse, de Gilles Bachelet. "On n’a jamais vendu un livre à dix maisons" commente Olivier Belhomme, un des cofondateurs de l'Atelier du poisson soluble. "Ce sont les albums et la petite enfance que recherchent avant tous les éditeurs étrangers et nous faisons toujours un tabac avec nos "Imagiers sonores"" raconte Hedwige Pasquet. Mais certains ne sont pas fairplay.  "Les éditeurs anglais regardent les livres, notent le nom des auteurs et les font travailler en direct sans acheter les droits" déplore un éditeur qui veut rester anonyme.
 

Bologne souhaite par ailleurs accompagner les professionnels dans les changements du secteur et poursuit son travail en direction des licences avec un hall entièrement consacré (Hall 31) avec Disney, Warner et Nickelodeon, où l’on pouvait notamment admirer le soulier géant (rose bien sûr) de Cendrillon annonçant le prochain Disney. Pour la première fois, un hall numérique (Hall 32) accueillait opérateurs et animations, en complément de la Master class du dimanche 3 avril.

Le cinéma, guest-star

La manifestation a eu son instant d’émotion avec la venue de la veuve de Roald Dahl et de son petit-fils. Son éditeur italien Salani a organisé une soirée le mardi 5 avril, donnant ainsi le coup d’envoi des festivités du centenaire, avant la sortie prévue cet été du film de Steven Spielberg, tiré du Bon gros géant, tandis que la foire a organisé, en collaboration avec l’Université de Bologne, deux conférences sur son œuvre.  

Tout se joue avant la foire répètent les éditeurs. Reste que tous les stands français commentaient le deux achats aux enchères de Bayard Jeunesse : Assassin’s Creed, tiré du jeu vidéo et acheté à Scholastic, et Timeless, tous deux accompagnés d'un film. Tandis que Christophe Tranchand, directeur éditorial de Milan Jeunesse, annonçait l’achat de "Créé ta propre aventure", une "sorte de livres dont vous êtes le héros dans lequel le jeune lecteur dessine, résoud des énigmes et participe à l’histoire", symbolisant l’essor du middle-grade, pour les 8-12 ans.

Réalité augmentée

La grande innovation est sans conteste la réalité augmentée, dont il a été beaucoup question lors de la Master class numérique "Dust or magic". Le stand collectif taïwanais permet de la tester avec l’adaptation de l’album All of my world is you, de Jimmy Liao. Tandis que chez Albin Michel Jeunesse, la collection "Histoires animées" accompagnées d’applications en réalité augmentée a attiré tous les partenaires étrangers de la maison selon Aurélie Lapautre.  

Lors de la cérémonie des BolognaRagazzi le 4 avril, ont été annoncés une nouvelle catégorie "Book & seeds" sur le thème de la nourriture et de la nature pour 2017. De plus les BOP (Best children publisher of the year, ou meilleur éditeur de l’année), décernés par la Foire et par l’Association des éditeurs italiens (AIE), ont été dévoilé. Le Britannique Andersen Press remporte le prix pour l’Europe, Bumble Books (Publishing Print Matters, République sud-africaine) pour l’Afrique, Kalimat (Emirats Arabes Unis), qui a aussi reçu un BolognaRagazzi, pour l’Asie, le Canadien Groundwood Books pour l’Amérique du nord, le Vénézuélien Ediciones Ekaré pour l’Amérique du sud, et le Néo-zélandais Book Island pour l’Océanie. Parallèlement outre l’Alma et le premier prix Strega Jeunesse, ont aussi été proclamés les prix Andersen, qui récompensent pour la première fois un auteur chinois, Cao Wenxuan, et l’illustratrice allemande Rotraut Susanne Berner. Enfin le 8^e prix international de l’illustration décerné par la Foire et la Fondation SM, doté de 30 000 dollars, a distingué le Mexicain Juan Palomino.
 
Tandis que les enfants des écoles et le public profiteront pendant le week-end, du 8 au 10 avril, de l’exposition des 50 ans d’illustrations et de la librairie internationale, des animations et autres spectacles comme "Pinocchio avant Pinocchio".