Proposer à une personne sourde la transcription textuelle d’une vidéo avec du son, rendre toutes les fonctionnalités accessibles au clavier pour un internaute qui ne peut manier une souris, assurer la compatibilité d'un site Internet avec une synthèse vocale pour un utilisateur malvoyant… Les adaptations de sites des médiathèques, logiciels et plateformes représentent un vaste chantier, dont le ministère de la Culture rend compte dans un Baromètre de l’accessibilité numérique en lecture publique. Après les rapports de 2014, de 2016 et de 2019, celui de 2023 montre que le chemin est encore long.
Pas toujours de site Internet
L’étude porte sur un échantillon de 132 bibliothèques et exclut les communes de 2 000 habitants “car elles ne disposent pas de portail dans la grande majorité des cas”, justifie le rapport.
Aucun des sites n’est conforme
37 sites Internet de bibliothèques (28 % de l’échantillon) présentent une page « politique d’accessibilité numérique », ce qui est plus qu’en 2019 (22 sites).
Problème : aucune de ces pages n’est conforme, ou à jour – le dernier Référentiel général d’amélioration de l’accessibilité (RGAA) datant de septembre 2019. Par exemple, certains sites ne permettent pas aux personnes malvoyantes de contacter la bibliothèque, de consulter ses horaires, ou tout simplement de naviguer seulement à l’aide d’un clavier d’ordinateur. Les contrastes peuvent également ne pas être conformes. Au global, la majorité des sites ont plus de 100 anomalies en page d’accueil. Les bibliothèques rappellent néanmoins parfois la possibilité pour les usagers d'adresser un recours auprès du Défenseur des droits.
Davantage d’aides à la navigation
52 sites ont mis en place des solutions d’aide à la navigation, comme la possibilité de modifier les couleurs ou la taille du texte ou de faire lire par une voix artificielle. Mais l’étude note que “ces solutions de confort n’offrent pas une accessibilité à tous les types de handicap et ne remplacent en aucun cas l’obligation d’accessibilité. Elles peuvent parfois même compliquer la navigation de certaines personnes en situation de handicap.”
Des catalogues parfois dégradés par rapport à 2018
Quand on regarde les interfaces publiques des catalogues de bibliothèque (Opac), leur accessibilité est parfois évaluée à la baisse par rapport à 2018. Au fil du temps, “une plateforme accessible proposée par un éditeur peut voir son accessibilité dégradée par les différents intervenants du projet, par exemple lors de l’élaboration de la charte graphique, l’intégration des différents composants ou la contribution”, explique le rapport, qui se veut optimiste : “l’étude des Opac montre qu’il est tout à fait possible techniquement de réaliser un site de bibliothèque ou de médiathèque accessible, qui permette à un utilisateur en situation de handicap de naviguer d’un bout à l’autre de son parcours.” Et de rappeler que l’accessibilité des plateformes proposées par les éditeurs est essentielle pour que les sites mis en production par les bibliothèques et les collectivités territoriales soient à leur tour accessibles au sens de la loi.
Des disparités entre les plateformes de ressources numériques
Neuf plateformes de ressources numériques ont été sélectionnées par l’association Réseau Carel (Coopération pour l’accès aux ressources numériques en bibliothèques), comme Cafeyn, Tout Apprendre, VoD Médiathèque numérique (Arte) ou Bibliovox. Verdict : là aussi il y a du travail pour permettre aux utilisateurs marqués par un handicap d'effectuer des recherches et d’arriver au document souhaité. Par exemple, aucun site ne dispose d’intitulé de formulaire correct. La plupart ne présentent pas de plan de site. Sur certains, le menu n’est plus lisible quand l’internaute zoom à 200 %, le son n’est pas réglable et l’accès à la connexion impossible quand le smartphone est en format portrait… Et seule une ressource numérique est réellement utilisable au clavier.
Ce bilan va permettre de définir les formations adéquates de techniciens en accessibilité numérique, de webmasters, d’agences web, d’éditeurs de progiciels ou encore d’éditeurs de ressources numériques.