Il y a treize ans, Jean-Paul Cointet publiait une Histoire de Vichy chez Perrin, repris depuis dans la collection "Tempus". Cette fois, son épouse, elle aussi historienne et spécialiste de la période, signe une Nouvelle histoire de Vichy. Michèle Cointet, professeure émérite d'histoire contemporaine à l'université de Tours, s'attache à montrer dans le détail le sabordage de la République et le fonctionnement du nouveau pouvoir.
En l'occurrence, la défaite sanctionne moins une personnalité qu'un régime : la République. Et c'est la République elle-même qui se saborde pour instaurer la dictature. C'est sans doute le point fort de ce livre. Montrer comment la France anesthésiée par la débâcle se donne au totalitarisme.
Ainsi, sur le premier statut des Juifs, Michèle Cointet explique que personne ne s'en était vraiment ému, comme si la France avait tiré un trait sur sa devise de "liberté, égalité, fraternité" au profit de "travail, famille, patrie".
D'autres points feront l'objet de débats, comme toujours lorsqu'il s'agit de cette période : l'épuration sauvage, "la plus forte d'Europe occidentale", le non-impact du STO dans le remplissage des maquis de la Résistance, la fausse image de la Milice, etc.
Plus qu'une nouvelle histoire de Vichy, il s'agit là d'une histoire politique de l'Etat français. On y voit Laval à la manoeuvre, Darlan s'enliser avant de finir assassiné et Pétain jouer le vieux maniganceur, plus idéologue qu'il n'y paraît, en tentant de ménager sa postérité. Mais, ne serait-ce que pour raconter la souffrance des victimes de ce passé qui ne passe pas, il y a encore de la place pour une nouvelle nouvelle histoire de Vichy...