Quel a été votre rôle cette année à l'Institut français ?
D'abord, le rôle de l'Institut français est d'accompagner la coopération dans le secteur du livre à l'international en coordination avec le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères qui pilote le réseau des attachés livre.
À Paris nous sommes 5 à gérer un certain nombre de programmes pour renforcer la place du livre en langue française dans le monde, soutenir la traduction littéraire et les échanges entre les filières du livre française et étrangères : par exemple le Programme d'aide à la publication (PAP), qui soutient la cession de droits à l'étranger, ou le dispositif Livres des deux Rives, dont l'objectif est de soutenir le dialogue entre les sociétés civiles des rives Nord et Sud de la Méditerranée par des actions de coopération autour du livre. Il vient d'être relancé pour deux ans jusqu'à 2026. Nous soutenons aussi la présence des auteurs de langue française à l'international dans leurs projets d'écriture par exemple à travers le programme Mobilité internationale de recherche artistique. Nous développons également une approche transmédia des œuvres littéraires, c'est-à-dire l'accompagnement à l'international de ces œuvres dans leurs différents formats d'expression et d'adaptation (livre audio, livre numérique, webtoons, films, séries, etc) via le programme Shoot the Book! (avec la Scelf, ndlr) Nous organisons par ailleurs, avec les responsables et attachés livre et débat d'idées, une rencontre annuelle destinée à favoriser le partage d'expériences, les échanges professionnels et à réfléchir ensemble à l'année écoulée, et à la suite.
Quels sont les projets les plus importants que vous ayez portés jusqu'ici, en France comme ailleurs ?
Pour commencer, À Taïwan, découvrant le métier en même temps que le territoire, je partais avec mon bâton de pèlerin dans les librairies et à la rencontre des éditeurs pour constituer une base de données des livres français traduits en chinois traditionnel. Ensuite, il y a eu le développement de la librairie Kyralina à Bucarest, qui continue de se développer avec une équipe formidable, notamment grâce à un service de portage propre à la Roumanie, qui rend Amazon inutile. La librairie a d'ailleurs reçu le Grand Prix des Librairies 2023 de Livres Hebdo de la meilleure librairie francophone à l'étranger. Et puis au Cambodge, où je travaillais à la coopération, j'ai pu soutenir l'ONG Sipar dans son projet d'édition. Pendant le confinement, il y a eu un regain d'intérêt des parents pour la lecture. Grâce à des conditions très favorables qui nous ont été faites par les éditeurs français, notamment l'École des loisirs, l'ONG a pu traduire, éditer et distribuer avec leurs bateaux-bibliothèques des titres de littérature jeunesse dans les villages en un temps record. Grâce à une aide conséquente à la traduction, nous avons rendu possible celle d'Un barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras en Khmer. Et puis cette année, il y a eu la grande concertation pour le livre français à l'étranger avec tous les acteurs professionnels et institutionnels. C'est une très bonne chose qui n'était pas arrivée depuis dix ans. Pourquoi maintenant ? Peut-être parce que le Sommet de la Francophonie arrive.
Forte de votre expérience internationale, quels conseils donneriez-vous aux éditeurs français qui souhaitent s'exporter le plus largement possible ?
Pour les éditeurs qui souhaitent se développer à l'international, ce qui, dit comme ça, est une sorte d'Everest, il existe deux structures qui sont d'excellent conseil, en plus, bien entendu, des Instituts français. D'abord la Fontaine O livres, une pépinière où faire des rencontres constructives, et une structure de conseil et d'accompagnement pour les jeunes éditeurs. Ensuite le BIEF, indiscutablement, auquel il faut certes cotiser, mais en fonction de son chiffre d'affaires. Je peux vous dire, pour l'avoir vécu, qu'arriver n'importe où dans le monde avec le soutien du BIEF, cela change tout. C'est sans équivalent au monde, une institution capable d'animer un stand dans n'importe quel festival du livre, qui connaisse aussi bien l'international. Enfin d'accompagner son catalogue partout le plus possible, d'arpenter le monde en somme avec les 3 premières pages de ses livres importants déjà traduites au moins en anglais. Ça fait toute la différence.