Combien d’entre nous ont "une vie comme un conte" ? Elspeth rêve d’être sous le feu des projecteurs. Lorsque Lord Coak la repère, elle croit son heure arrivée. Sa proposition semble inespérée : l’amener dans les Caraïbes, sur l’île de la Barbade. Cette jeune fille de 19 ans ne peut refuser une telle destinée. Elle quitte, sans regret, son Ecosse pluvieuse pour une vie prometteuse. Son pygmalion ne lui a pas menti, "la nature même de son existence" se retrouve changée.
Le paradis est à ses pieds. Intégrée dans une troupe théâtrale, elle y rencontre le beau George. Il l’initie à l’amour, mais, par une terrible nuit de 1831, une tempête lui ravit la vie. Perdue, Elspeth ressent "une douleur lancinante" qui oriente toute sa trajectoire. "Son monde est tout bonnement ébranlé", lorsqu’elle est recueillie par le Capitaine Shaw, un homme raciste, haineux et frustré, qu’on découvre peu à peu à travers ses carnets. "La Race celte est la plus spirituelle de toutes. Une guerre sévit dans le ciel, et nous en sommes le reflet sur terre." Son projet ? Bâtir une colonie à Roseneythe.
C’est là que le roman de Chris Dolan prend une autre tournure. On n’est plus dans un classique anglais, mais dans un univers redoutable, inspiré par la carrière de l’auteur à l’Unesco. Auteur, essayiste, journaliste, scénariste et dramaturge - né à Glasgow en 1957 -, il tisse une mise en scène machiavélique. Elspeth est prise au piège d’un système colonial, dont elle devient la pièce maîtresse.
Un remarquable portrait de femme sur fond d’esclavagisme, d’émancipation et de questions politiques. Toute construction d’un nouveau monde est-elle vouée à l’échec ? A l’heure des scissions, quels sont les choix ou les décisions à adopter ? Vertigineux ! K. E.