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Tribune : "LIR, un label qui n’est plus adapté aux périls qui guettent la librairie française"

Guillaume Dervieux - Photo O. Dion

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Pierre Coursières (Furet du Nord), Guillaume Decitre (Decitre), Guillaume Dervieux (Albin Michel), Franck Ferrière (Gibert Jeune), Olivier Pounit-Gibert (Gibert Joseph) et Yannick Poirier (Tschann) répondent dans une tribune adressée à Livres Hebdo à ceux qui s'opposent à l'amendement sénatorial modifiant les critères d'attribution du label LIR.

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"Il y a en France 3000 librairies. Parmi elles, moins de 550 se sont vu attribuer le label LIR. Elles bénéficient en conséquence d'un avantage décisif : l'exonération de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Les autres 2450 librairies petites, grandes et moyennes (dont nous faisons partie), elles, n'y ont pas droit. Pourquoi ?
 
Il y a en France 3000 librairies mais il y aurait donc deux espèces de libraires.
 
Inégalité de traitement

Pourtant, dans les 2450 librairies exclues du label LIR et donc de l'exonération fiscale, des milliers de libraires travaillent et s'emploient, au quotidien, pour promouvoir le livre et la lecture. Ils y organisent chaque année des milliers de signatures, conférences et tables rondes pour défendre des auteurs qu'ils ont aimés, auxquels ils croient. Ils les défendent par leur talent et leur passion. Ces magasins connaissent souvent des difficultés économiques, se battent pour survivre, y échouent parfois (comme l'ont montré les difficultés récentes de Gibert jeune). Et cela tout autant que les 550 librairies qui ont droit au Label LIR. Mais voilà, une partie de la profession, le Syndicat de la librairie française et le Ministère de la Culture, censés nous défendre et nous porter, ont pourtant jugé qu'elles ne pouvaient bénéficier du même soutien.
 
Nous avons décidé de ne pas nous résigner à cette inégalité, parce qu'elle constitue une injustice. Et qu'elle nous mène tous au désastre.
 
Nous ne nous résignons pas au statu quo

Contrairement à ce que proclament ceux qui défendent ce label (dont ils bénéficient déjà, pour la plupart), LIR est devenu inadapté aux périls qui guettent la librairie française. Nous tous, libraires de profession, petits, moyens ou grands, sommes des acteurs culturels majeurs de nos territoires, de centres villes parfois paupérisés et désertés, où, comme le titrait Le Monde il y a quelques jours, « le commerce est à bout de souffle ». Petits, moyens ou grands, nous avons à lutter contre la surpuissance des grands acteurs de la distribution et des géants du numérique, largement exonérés de taxes et d'impôts. Comment ne pas s'en apercevoir et en comprendre les enjeux ? Comment ne pas se rassembler face à cette concurrence souvent déloyale ?
 
C'est parce que nous voyons le péril qui guette la librairie française que nous ne nous résignons pas au statu quo. C'est parce que toutes les librairies françaises, même les plus prestigieuses, courent le même danger que nous voulons agir. C'est parce que toutes les librairies françaises, petites, moyennes ou grandes, doivent pouvoir compter sur le soutien des pouvoirs publics que la loi doit changer. C'est parce qu'il nous semble inadmissible que certains décident, en vertu de critères qu'on ne comprend plus, en se substituant aux élus de nos communes, quel libraire sera avantagé ou pas, que nous sommes sortis du silence pour défendre plus que notre profession : notre métier.

La loi doit changer
 
La loi doit changer car la situation de la librairie et son environnement concurrentiel ont changé. Plutôt que de s'attacher à préserver un dispositif inadapté au monde économique actuel et futur, il est temps d'accompagner le législateur qui souhaite légitimement donner à toutes nos librairies, petites, moyennes ou grandes, les moyens de leur avenir et faire des maires les seuls décideurs en fonction des réalités de leurs communes. Car les 3000 librairies françaises comptent bien exister dans 10 ans, pour partager leur passion, animer nos villes et territoires et rester les garants d'un lien social nécessaire, fortes de la bienveillance d'un Etat qui aura compris l'enjeu qui est le nôtre."

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