Plus de soixante-cinq ans qu’il dessine, mais chacun de ses nouveaux albums - à 82 ans, il demeure prolifique - reste un choc esthétique. Le style très réaliste de René Follet a été forgé dans les années 1950. Le dessinateur belge s’est lancé très tôt en illustrant des romans pour la jeunesse et, dans le journal Spirou, certaines des fameuses Belles histoires de l’oncle Paul. Pourtant la vivacité de son trait et la flamboyance de ses couleurs, que l’on retrouve dans ce portrait de Stevenson, le pirate intérieur, donnent à son travail une puissance picturale qui conserve toute sa pertinence aujourd’hui. Son œuvre souvent méconnue retrouve même une nouvelle jeunesse alors que des auteurs plus jeunes tels que Christian de Metter, Denis Deprez ou Joe G. Pinelli proposent comme lui une bande dessinée proche de la peinture.
L’évocation de Robert Louis Stevenson (1850-1894) marque pour René Follet un retour aux sources. C’est en illustrant, à seulement 15 ans, une soixantaine de vignettes à collectionner dans des tablettes de chocolat pour illustrer L’île au trésor, premier grand succès du grand écrivain voyageur écossais, que le dessinateur s’était lancé. Le scénario efficace de Rodolphe lui permet de lui rendre un bel hommage. Les deux auteurs retracent par courtes séquences les moments clés de la vie de l’auteur de L’étrange cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde. Ils suivent ce jeune homme à la santé fragile, mais aux rêves féconds et à l’imagination fertile, de sa naissance à Edimbourg à ses voyages en France et aux Etats-Unis. Ils montrent son amour passionné pour Fanny, qui deviendra sa femme. Ils soulignent sa vitalité étonnante, qui a fait de sa vie aventureuse, de ses songes et de ses œuvres une même saga culminant dans l’audacieuse traversée du Pacifique qui le mènera jusqu’aux îles Samoa, où il mourra prématurément. Fabrice Piault